Voici la seconde partie de l'article consacré aux églises de Guémené, après celle publiée hier évoquant l'ancien bâtiment détruit à la fin du XIXème siècle.
Vers 1870 - 1880, la population de Guémené est à son plus haut, le double d'habitants par rapport à un demi-siècle auparavant. Parallèlement, on l'a vu, l'ancienne église est non seulement petite au regard de cet effectif, mais elle n'est pas en très bon état non plus.
Un curé dont j'ai déjà, par le passé, évoqué l'oeuvre, pour ne pas dire le combat, le curé Revert (voir l'article : "Tout Revert a sa médaille"), comprend vers 1878 que le temps est venu de songer à une nouvelle église.
La difficulté première va consister à fédérer, dans le cadre d'une commission, les différentes couches de notables dont le concours est nécessaire, autour du projet.
Le problème réside moins dans la noblesse terrienne locale : elle est absente certes du conseil municipal mais, catholique, elle s'avère active dans le conseil de fabrique, lequel va devoir mener ce projet.
A côté, il y a les Simon, qui incarnent à Guémené depuis bientôt 80 ans le pouvoir municipal (il y a aussi un député) et dont les options politiques, certes variables, républicaines modérées et modérément républicaines, sont éloignées des idées ultra royalistes qui inspirent certains hobereaux du cru. Il faut compter avec eux car ils sont la courroie de transmission vers le Pouvoir central et ses subsides éventuels.
Parlant de sa commission, le curé Revert écrit à l’Évêché en janvier 1879 : "Les nobles ont accepté avec empressement d'en faire partie. Les nobles et les Simon sont attelés au même char , ce qui ne s'est pas fait sans patience ni peine. Maintenant reste à les faire avancer sans culbute." Le 29 janvier 1879 est sa date fondatrice.
Les premières esquisses architecturales s'inspirent de la volonté commune de disposer d'un vaste édifice, non seulement pour des raisons objectives de taille de population, mais simplement pour faire mieux, au chef-lieu de canton, que le voisin : c'est Guémené qu'aura la plus grosse, d'abord.
La commission s'avise cependant qu'il paraît peu acceptable de proposer des plans correspondants à une église urbaine pour une simple église de campagne : elle décide donc de présenter un devis convenable, quitte à le modifier en cours de construction...
Cette sainte tricherie est déjouée : les trois premiers devis sont refusés. Les Simon sont favorables à un projet simple. L'affaire va traîner un peu, du coup.
On apprend par une délibération municipale du 22 décembre 1878 que le conseil de fabrique devra se débrouiller seul avec l'architecte nantais Bougouin (voir l'article : "Adieu Bougouin !"), l'entrepreneur et pour les démarches à effectuer. On y lit surtout que les revenus de la fabrique, 8.000 francs ( 25 à 30.000 euros) par an, seront entièrement affectés pendant dix ans au projet de nouvelle église.
Entre-temps, un terrain a été trouvé. Ou plutôt offert par Madame Louise-Marie-Caroline-Philomène Jan du Bignon, épouse de Monsieur Arthur-Gaëtan-César-Marie Potiron de Boisfleury, propriétaire demeurant au Boisfleury. Ce terrain de la Bidaudais (un champ de foire) est aussi conséquent que l'identité des donateurs et doit supporter la construction de la nouvelle église ainsi que "l'établissement autour de cet édifice de boulevards et d'un parvis".
Par un vote du 9 avril 1879, la Municipalité autorise le conseil de fabrique à accepter ce don, aux conditions fixées par la bienfaitrice (?).
L'affaire se débloque définitivement dans le courant de l'année 1883 où la souscription lancée auprès de la population est close : elle rapporte 61.000 francs (200.000 euros), avec des oboles variables (de 1 à 10.000 francs). Tant et si bien que la bénédiction de la première pierre a lieu le 21 septembre 1884, avec évêque et fanfare. D'ailleurs, les communes avoisinantes sont conviées à la fête.
Ensuite, les travaux vont à un rythme rapide. Comme c'est l'usage, à côté des dons en argent, des participations en nature sont sollicitées (charrois et travaux manuels divers).
Bien entendu, le devis n'est pas respecté et on cherche à revenir au plan pharaonique initial...Finalement, le dimanche 4 juillet 1886 a lieu la première messe, suivie par la bénédiction de l'église le 4 août.
C'est à la démesure de ses promoteurs que l'on doit également bien entendu le fait que, malgré l'espace concédé par les Boisfleury, cette église a dû être orientée Nord-Sud et non Est-Ouest comme c'est la règle.
J'ai pas mal publié de textes de d'illustrations sur ce bâtiment et ses détails extérieurs ou intérieurs, que l'on peut trouver en tapant "église de Guémené" dans le barre de recherche en tête de ce blog.
Le curé Revert souhaitait être enterré dans sa "cathédrale" : je ne crois pas que la translation de ses cendres eut bien lieu comme envisagé, mais, comme par hommage, terminons sur la plaque qui, à l'intérieur de l'édifice, est supposée marquer l'endroit de son ensevelissement :
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