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dimanche 29 juin 2014

Inauguration de l'école Saint-Michel


Il est des lectures édifiantes et il est parfois regrettable que les titres de presse soit si éphémères.

Je me suis ainsi délecté à la lecture d'un organe aujourd'hui disparu - et qui assurément nous manque -, un journal patriote d'antan qui ferait encore bonne figure de nos jours, je veux parler du Nationaliste de l'Ouest.

Fondé vers 1899, cette feuille de choux arborait à sa "une" la fière devise qui n'a hélas pas perdu de son actualité : La France aux Français !


On devine assez vers quelle tendance politique ce journal versait et c'est sans surprise qu'on y trouve une relation émue et française d'un événement marquant qui toucha Guémené vers le début du siècle passé.

L'action se situe le dimanche 10 octobre 1909. Elle a pour cadre l'église de Guémené à l'heure des vêpres, puis le court espace de rues qui sépare cet édifice de l'école Saint-Michel et, enfin, la cours de cette école elle-même dont c'est l'inauguration ou, pour mieux dire, la "Bénédiction".

Ainsi commence l'article dont je me m'inspire :

"Le dimanche 10 octobre 1909, la population chrétienne de Guémené-Penfao, était convoquée à la bénédiction d’une école chrétienne de garçons."

Je dirais même chrétiennement plus :

"Le dimanche chrétien 10 octobre chrétien 1909, la population chrétienne de Guémené-Penfao, était chrétiennement convoquée à la bénédiction chrétienne de l'école chrétienne de garçons chrétiens".

On commença par chanter des vêpres. L'abbé Arbeille butinait autour de l'autel, entouré de ses vicaires. Parmi eux le Père Martin, Eugène ou Edouard, car comme on sait, il y en a plus d'un qui s'appelle Martin.

Des prêtres des environs s'étaient également joints à l'événement, ainsi que le chanoine Courgeon, enfant du pays et fer de lance de la reconquête scolaire dans le diocèse.

L'église était pleine comme un œuf, ce qui n'était pas très forcément usuel pour ce genre de cérémonies. On avait là les bienfaiteurs, les nobliaux qui avaient offert le terrain, des prêtres du coin, quelques notabilités et des paysans avec leurs enfants, tous endimanchés, cela va de soi.

On débita les psaumes et leurs antiennes. Une petite lecture d’Évangile et un Magnificat plus loin, on en vint à l'essentiel.


Au milieu du choeur de l'église gisaient des crucifix exposés sur trois
 brancards "gracieusement ornés de rouge et de blanc".

Le curé Arbeille s'approcha et se mit à bénir ces objets. Puis le bonhomme s'écarta et de petites mains empoignèrent les brancards. Comme le remarque nos sources journalistiques, "les enfant sont heureux de porter les Crucifix qui bientôt présideront à leurs travaux"

La procession s'organisa derrière ces brancards que leurs porteurs dirigeaient vers le portail de l'église. Les prêtres tenaient la tête, suivis de deux longues files d'enfants, filles et garçons, de l'école Sainte-Marie et de la nouvelle école Saint-Michel. Les parents et les autres paroissiens passèrent derrière.

Tout se petit monde trottinait gentiment en chantant un cantique de circonstance :

Nous voulons Dieu dans nos écoles,
Pour qu'on enseigne à tous nos fils
Sa loi divine et ses paroles
Sous le regard du Crucifix.


Les curés et quelques dévots, les enfants à qui on l'avait inculqué, vociféraient le couplet et la foule reprenait en choeur le refrain :

Bénis, ô tendre Mère,
Ce cri de notre foi;
Nous voulons Dieu, c'est notre Père,
Nous voulons Dieu, c'est notre Roi.


C'était un bien bel ensemble et qui faisait bel effet. Et puis ce beau cantique vous remuait la conviction jusqu’au fond de la moelle. D'ailleurs, il comporte un autre couplet qui n'allait pas tarder à avoir quelque actualité :

Nous voulons Dieu dans notre armée,
Afin que le jeune soldat
En servant sa patrie aimée
Meure en chrétien dans le combat.


(Quel étrange idée...Ne serait il pas plus juste de dire : nous voulons Dieu dans notre armée pour que les jeunes gens de notre armée ne meurent pas au combat ?)

Aux fenêtres des maisons de la place de l'église, sur les trottoirs, quelques personnes observaient le flot des hommes, des femmes, des enfants et des prêtres, avec recueillement.

Bientôt la tête du cortège atteignit l'école et pénétra dans sa cours. Petit à petit, la procession s'engouffra et se disposa dans cette enceinte.

C'est à ce moment que le chanoine Courgeon prit la parole. Le chanoine était né à Guémené et avait fait une belle carrière ecclésiastique.

Depuis 1888, Henri -Aimé-Marie Courgeon était chanoine prébendé, ce qui n'implique rien de particulièrement cochon, mais veut dire simplement qu'il touchait un traitement.

Il avait vu le jour le 7 janvier 1850 au Grand-Moulin que l'on voit toujours sur le Don, d'un père farinier. Visiblement les Courgeon avaient l'habitude de rouler dans la farine, car au moment où se déroule notre petite fête, une autre branche des Courgeon était meunière à la Grée-Bréhaut, dans l'un des moulins de la Butte.

Passé ce premier pas matinale dans la carrière (il naît à quatre heures du matin), Henri poursuivit sa route pendant vingt-quatre ans jusqu’à être ordonné en 1874. C'est une carrière dans l'enseignement qu'il choisit : il sera ainsi maître d'établissement au Petit Séminaire, à l'Ecole Normale Ecclésiastique, puis à Saint-Stanislas, avant d'être nommé Supérieur de Guérande, en 1885.

Autant dire que ce n'était pas rien que de l'avoir là, dans la cours de la nouvelle école. Tout modeste, il s'avance et, lui "qui aime tant son pays natal, adresse à tous ses encouragements et ses conseils" (fais tes devoirs, respecte tes maîtres, dis tes prières, lave-toi les dents, fait la bise à la grand-mère, t'occupe pas des filles - ni des petits-garçons-, mouche-toi le nez, etc...).

Les mères des écoliers de Saint-Michel furent émues. Mais le meilleur restait à venir.

Alexandre Arbeille, succédant au Chanoine, s'adresse à la foule "en termes émus qui tirent les larmes des yeux, remercie tous ceux qui ont concouru à la beauté de la fête. Enfin, il adresse un merci aux parents qui ont su si bien comprendre leur devoir".

C'en est trop, il faut débonder le trop-plein d'émotion qui gît au fond du coeur de chacun. Pour se soulager, un autre cantique de circonstance est entonné qui clôt la cérémonie :

Ils ne l'auront jamais
L' âme des enfants de la France !
Redisons ce cri de vaillance :
Ils ne l'auront jamais, jamais !

Tant que brillera le soleil
Sur nos champs et sur nos montagnes,
Tant que les fils de nos campagnes
Prieront aux heures du réveil ;

Jadis nos pères ont souffert,
Leur sang a coulé dans nos plaines ;
Mais ils ont su briser leurs chaînes !
L'amour est plus fort que l'enfer.

Pour tomber sous leur joug honteux,
Enfants, vos âmes sont trop belles !
A Dieu vous resterez fidèles
Et vous regarderez les Cieux !

Et nous, jusqu'au dernier soupir,
Nous crierons : Règne sur la France,
O Christ, notre unique espérance :
Plutôt que t'abjurer, mourir...


On voit bien que tout dépendait quand même de ce que "les fils de nos campagnes prieront aux heures du réveil" ou pas...C'était pas gagné...

samedi 21 juin 2014

Nous entrerons dans la carrière...


J'ai dû marquer une pause de quelques jours dans la tenue de ce blog. Pas faute de sujets, mais faute de temps. Rien de grave, donc.


Il fait beau, j'ai envie de sortir et de vous faire profiter d'une excursion que j'ai faite récemment dans la région.

En route donc pour Fégréac et plus précisément pour une sorte de bout du monde étrange où se mélangent le plat et l'élevé ; l'eau, l'air et la terre ; le canal et la rivière, etc...

De Guémené, on prend...la route de Fégréac, qu'on quitte pour la Départementale 35, à peine deux kilomètres avant d'arriver à ce bourg. Il suffit ensuite d'aller jusqu'au bout de cette voie et de s'arrêter au bord de la Vilaine.

L'endroit s'appelle le Bellion. Quelques maisons, une chapelle qui rappelle les pèlerins de St-Jacques...et on a manqué, sur la gauche en arrivant, une colline formidable dont l'élévation n'est pas soupçonnable depuis la route.

Pour ceux qui savent, il faut emprunter le petit chemin pourtant barré d'une chaîne. Un panonceau indique qu'on peut entrer.

Le chemin serpente jusqu'à une esplanade qui forme une sorte de plateau fermé sur la plupart de ses côtés. On se trouve à mi-hauteur de la colline et déjà l'on domine la vaste plaine plate de la Vilaine. En face est Rieux et son château ruiné.

A droite sur le plateau, un bâtiment à l'allure précaire surplombe des gradins de bois à flanc de pente. Tout au fond en contrebas, des baraques poussiéreuses et une vaste place : la colline n'est qu'une grosse dent creuse.

Quand on continue sur le plateau on aborde un baraquement abandonné dont l'aspect révèle une sorte de buvette ou de saloon de cité abandonnée du Far-West.

D'étranges inscriptions en russe signalent des villes lointaines de Sibérie ou du Caucase : Sotchi, Nijni-Novgorod, Moscou, Astrakhan....Il s'agirait donc plutôt de vestiges d'une ville pionnière du Far-East...

A gauche, le plateau est bordé de falaises abruptes. Au fond de cet espace, un chemin reprend l'ascension vers l'étrange couronne de bois qui culmine au-dessus de nos têtes.

Quelques efforts de montée plus loin, on débouche sur une nouvelle place. Une guitoune de rondins abrite des panneaux explicatifs, et l'on apprend que la construction au pied de laquelle nous venons d'échouer est l'oeuvre d'un artiste russe, Nicolas Polissky.

Son oeuvre à tout l'air d'une Tour de Babel, un ziggourat ligneux dominant, non pas la vallée du Tigre ou de l'Euphrate, mais celle de la Vilaine (et du canal de Nantes à Brest dont le tracé vient lécher ici celui du fleuve).

Le babil cacophonique de ses constructeurs s'est tu, emporté par le vent qui balaye cette hauteur.

Evidemment, la solitude de l'endroit donne toutes les audaces. On entreprend donc l'ascension de ce Belvédère artistique.

Un chemin de bois sécurisé contourne en spirale ascendante le bouquets de poutres lancées vers le ciel et, sans fatigue, on arrive au sommet, une douzaine de mètres au-dessus de la limite naturelle de l'éminence, plus haut que quoi que ce soit autour.

Voilà comment on vainc la Butte Saint-Jacques ou Carrière du Bellion. Tels les guetteurs qui aux temps préhistoriques et dans l'Antiquité scrutaient l'arrivée des ennemis, on porte un regard circulaire et descendant sur la nature située tout en bas et au loin.

Une voie romaine aurait cheminé au pied de cette colline.

Puis les hommes y ont puisé le matériau de leurs bâtiments, évidant en partie la butte devenue carrière au XIXè siècle.


Des bâtiments importants y furent construits, abritant deux machines à vapeur, un concasseur et un système de transfert par wagonnets qui convoyait les granulats vers une trémie installée sur le halage et chargeait les péniches. 

Quinze à vingt ouvriers y travaillaient, gens de Rieux, St Nicolas, Sévérac, mais aussi Polonais ou Italiens.

Les conflits du Front Populaire vinrent trouver un écho dans ce site avant que son abandon ne le transforme en f
riche industrielle depuis la seconde guerre mondiale.

Aujourd'hui, une association y donne des spectacles, l'été, en plein air. On annonce d'ailleurs plusieurs représentations théâtrales, du 18 juillet au 14 août prochains, de Un chapeau de paille d'Italie, cette pièce désopilante de Labiche. A ne pas manquer probablement.

Voici quelques photos que j'ai prises lors de cette escapade. L'oeuvre de l'artiste russe est documentée sur Internet, il suffit de taper son nom dans le moteur Google.

Profitez!









































lundi 9 juin 2014

Pierre Fidèle n'amasse pas mousse


Il est des décisions dont la portée est incalculable.

Nul doute que, le 20 août 1899 quand Fidèle Simon (fils) est sur le point de réunir son Conseil Municipal et qu'il noue sa cravate devant sa glace, c'est plus la mauvaise conscience résultant d'imminents petits arrangements entre amis que la prescience d'une bonne action en faveur d'un jeune destin qui le titille.

Mais, dans le fond, son fidèle Gilles Durand, ce Premier Adjoint inusable, sera absent de cette séance : cette délicatesse devrait suffire à apaiser les scrupules.

Hormis celui-ci donc, il sont tous là, réunis dans la grande salle nue du rez-de-chaussée de la Mairie : Bernard, Taillandier, Gascoin, David, Clavier, Amossé, Alliot, Drion, Desvaux, Bréger, Radigois,...bientôt rejoints par Plédel, Perrigaud et Chapron. Pas d'erreur : à l'énoncé de ces patronymes, nous sommes bien à Guémené.

L'ordre du jour de la séance est copieux et tourne autour de la plupart des sujets qui agitent ordinairement une municipalité rurale : payer une réparation du presbytère ; financer un nouveau chemin entre St-Georges et Mézillac ; acheter un avant-train hippomobile pour tracter la pompe à incendie ; valider les comptes de la Fabrique de Beslé ; adopter le règlement de l'assistance médicale gratuite (un sujet de dispute avec le préfet...) ; approuver une dépense de 22 fr. 98 pour la destruction des hannetons (618 kg d'éliminés !) ; demander une dispense de période militaire pour deux soutiens de familles, le gars Poitral du Bot et Pierre Debarre du Verger.

Et puis l'inventaire à la Prévert des sujets continue :  il y a cette lettre du Conseil de Fabrique de Guémené qui demande le transfert "des restes mortels" de l'Abbé Revert dans l'église dont la construction fut l'oeuvre épuisante de sa vie ; suivie de la demande de deux étalons pour la station de monte de Guémené ; la construction de trottoirs ; la dette de 8000 fr. de la Fabrique de Guémené pour la construction de l'église à éponger....

Toutefois la fin du tunnel apparaît enfin.

Douzième point : "M. le Maire propose au Conseil Municipal de donner un avis favorable à la demande de M. Durand Pierre Fidèle concernant une bourse avec trousseau à l'Ecole du Service de Santé de Bordeaux".

La raison de cette proposition pourrait être le caractère prometteur du jeune homme, ses bons résultats scolaires, joint à la modicité des revenus de ses parents...(peu probable, cette dernière, vu qu'il est déjà bachelier). Mais M. le Maire argumente : "...attendu que son père, M. Gilles-Fidèle-François-Marie Durand, adjoint au Maire de Guémené depuis plus de vingt ans, a rendu de grands services à la commune..."

Bref, Pierre Fidèle aura son trousseau car c'est le fils de papa Gilles Fidèle, qui est le copain de Fidèle...

Ainsi, comme un seul homme, les Taillandier, Gascoin et autres Amossé de service, "après en avoir délibéré", rendent un avis favorable à la dot du futur médecin-major de la Marine.

Mais après tout, on peut vérifier l'usage que fit Pierre Fidèle de l'argent que les contribuables guémenois lui confièrent pour les beaux yeux de papa ? en fut-il seulement digne ?

Ce jeune homme était né le 5 août 1877 à Guémené. Il fit certainement d'assez bonnes études. Vers l'âge de vingt ans, le Conseil de Révision le saisit dans la situation d'aspirer au doctorat en médecine, ce qui lui vaut un sursis d'incorporation.

Fort du trousseau payé par la Commune, Pierre Fidèle est nommé élève du Service de Santé de la Marine ("Santé Navale", dans le jargon) en septembre 1899. Il s'y présente avec son baluchon municipal le 20 octobre 1899.

Ce n'est pas rien, "Santé Navale" : créée à Bordeaux par une loi du mois d'avril 1890, cette école est placée sous les ordres d'un directeur du service de santé de la Marine assisté d'un sous-directeur et d'un certain nombre de professeurs, médecins et pharmaciens de la Marine.

Les éleves proviennent d'une des trois écoles annexes de Brest, Rochefort ou Toulon. Ils ne sont admis à Bordeaux qu'à la suite d'un concours qui a lieu tous les ans dans ces trois ports militaires.

En entrant à l'école, les élèvent contractent un engagement militaire de trois ans et s'obligent à servir six ans dans le corps de santé de la Marine ou dans celui des troupes coloniales.

A leur sortie de l'école, ils sont nommés médecins ou pharmaciens auxiliaires de 2ème classe de la Marine, puis médecins aide-majors des troupes coloniales pour ceux qui ont opté pour ce corps.




Le matricule 504 Pierre Fidèle n'est pas un colosse et, quoique bien nourri, il ne dépasse pas les 1 m 64. Il a le poil brun, des yeux gris et un visage rond accommodé d'un long menton.

Il accomplit sa formation de médecin militaire colonial probablement sans encombres.

Le 15 janvier 1903, à à peine 26 ans, le jeune carabin s'embarque pour le Sénégal et le Moyen-Niger alors en guerre. Puis c'est la Haute-Guinée, également en guerre, à partir de novembre 1903, jusqu'en octobre 1904. Il est affecté au 1er Régiment de Tirailleurs Sénégalais en qualité de médecin aide-major de 1ère classe. Il changera d'affectation en novembre 1904, rejoignant alors le 1er, puis le 4è, Régiment d'Artillerie Coloniale.

De retour en métropole, il se marie à Lorient en novembre 1905.

Il est ensuite désigné pour servir au Tonkin en février 1906 et il passe alors au 10è Régiment d'Infanterie Coloniale. Il servira en Extrême-Orient français de mars 1906 à mai 1908.

Il achève son service au 1er Régiment d'Artillerie Coloniale en 1908, avant de prendre un congé de trois ans en janvier 1909 et de finalement démissionner en août 1911.

Décoré de la Médaille Militaire (agrafe de l'A.O.F.), il profite du retour à la vie plus ou moins civile pour avoir un ou deux enfants (deux filles lui naissent vers 1908, dont une à Lorient ; une troisième viendra en 1917, à Guémené).

La guerre de 14 le rattrape, comme bien d'autres. Il a 37 ans au moment de la mobilisation. Il rejoint l'ambulance 14/22 en formation à Paris, en tant que médecin-major de 1ère classe. En juin 1916, il est affecté à l'ambulance 8/22 : en juillet il est promu médecin-major de 2è classe.

En mai 1917, il est mis à la disposition de la place de Lorient. Il est alors affecté à l'hôpital du Lycée de Lorient, avant d'être envoyé à Brest.

A la fin du conflit mondial, on le trouve provisoirement médecin communal à Scaër et il termine la guerre au dépôt du 1er Régiment d'Artillerie Coloniale.

En janvier 1919, il est mis en congé illimité de l'armée et regagne Guémené avec femme, bagages et filles.

En 1921 il figure au recensement de Guémené comme "docteur". Il y demeure avec sa femme, une de ses filles et une jeune domestique.

Le 6 septembre 1922, à Nantes, le Général de brigade Claudon "après avoir fait prendre les armes à la troupe...fait placer devant le front de bataille M. Durand médecin-major de 2è classe de réserve, nommé chevalier de la Légion d'Honneur, à l'effet de recevoir cette qualité".



L'honorable légionnaire perd sa femme dans les mois qui suivent son élévation au grade de chevalier avant de s'éteindre lui-même en sa commune natale, le 7 avril 1928.

Mais où donc courtils ?


Encore un petit article sur un vocable que l'on retrouve sur le territoire guémenois à plusieurs endroits et sous différentes déclinaisons.

Le terme "courtil" est un vieux mot français qui désigne un jardin attenant à une ferme, un jardin ou en enclos champêtre.

En principe donc, à l'instar des "Chaintres" évoquées dans l'article précédent, les Courtils caractérisent des lieux-dits situés auprès d'habitations des villages.

A l'examen, on dénombre quatorze façons d’accommoder le "Courtil" à Guémené, réparties sur un peu moins d'une vingtaine de sites.

Le plus simple c'est évidemment le "Courtil" dont on trouve un exemplaire à la Biliais et un autre à Orvault.

Au pluriel, Balleron accueille les "Courtils". Mais les "Grands Courtils" concernent la Vallée, le Bot et la Daviais.



Ensuite viennent des formes composées.

Les "Courtils du Bois" désignent une bande de terrain situé en bas du parking devant la Mairie, dans le Bourg de Guémené. On trouvera les "Courtils Hauts" à la Bourdonnière.

C'est ensuite une litanie où "Courtil" fait l'objet d'une précision sous forme d'un complément (de lieu, en général).

On a ainsi : le "Courtil de Derrière" (à la Lucrais) et celui "de Devant" (à Coisnerion et au Bourg-Jamet).

Puis viennent le "Courtil de l'Aire Colin" (à  Libon) ; le "Courtil de Là-Bas" (à Tréguely) ; le "Courtil de la Porte" (à Dastres) ; le "Courtil du Four" (à Balleron) ; le "Courtil du Puits (aux Rivières) ; le "Courtil au Vin", bande de terrain contre le jardin de la Cure, dans le Bourg ; et le "Courtil de Richebourg" (à...Richebourg).

Ces "Courtils" sont moins nombreux que les "Jardins" dont on dénombre environ vingt-cinq variétés parmi les lieux-dits de Guémené.

Mais ce sera pour une prochaine fois.

samedi 7 juin 2014

Où tomber en chaintres à Guémené ?


Il y a environ un millier de lieux-dits sur toute l'étendue de la commune de Guémené. En tout cas dont on conserve aujourd'hui la mémoire.

Je me suis penché sur ceux qui sont associés au vocable "chaintre", encore écrit "chintre".

Le terme "chaintre" est un terme d'agriculture (qui m'était personnellement inconnu) qui revêt plusieurs signification que je livre ci-après.

Ce terme peut ainsi désigner une petite excavation en bout de champ qui sert d'égout aux eaux pluviales. Une autre acceptation est celle de bordure d'un champ ou d’extrémité de sillon. On trouve également, parmi les définitions, la notion de réserve de pâturage pour le bétail. Enfin, ce mot fait référence à un mode de culture de la vigne spécifique aux départements de l'Ouest de la France.

Sur la commune de Guémené, il existe sept endroits portant le simple terme de "la Chaintre". Ils sont situés tout près des villages suivants : Richebourg, la Foie, le Port Jarnier, la Daviais, Beix, le Jarrier, la Bazinais.

Dans l'orthographe alternative de "la Chintre", sont concernés les hameaux suivants : Juzet, les Chatelais, Retz, les Landelles, les Drieux.

Sous la forme plurielle, on repère des "Chaintres" au Bas-Méauduc et des "Chintres" au Bot, dans le bourg de Guenouvry, à Libon et à la Bruchais.

Et puis, il y a "Chaintre" (ou "Chintre") et "Chaintre" (ou "Chintre").

Et pour ne pas les confondre, elles sont alors distinguées par un complément de lieu.

On a ainsi la "Chaintre du Puits" (le Bot), la "Chaintre de Derrière" (la Saunerie), la "Chaintre de la Fusaie" (Retz), la "Chaintre de Devant" (la Daviais). 

Dans le même ordre d'idée, on relève une "Chintre de la Forgeraie" (Bas-Méauduc), une "Chintre du Bas" (le Bot), une "Chintre de la Renaudière" (Dastres).

Au pluriel, on notera encore "les Chintres Marchand" (Dastres) et "les Chintres du Four" (Feuilly).

Pour terminer cet inventaire, il conviendrait d'ajouter "Sous les Chintres" (zone relativement importante aux confins de Guémené et de Massérac, au-dessus du village du Verselet) ; le "Pré sous les Chintres" (Bas-Méauduc) et "les Chintraux" (le Bot).

Les emplacements correspondant aux lieu-dits évoqués précédemment sont de façon assez frappante toujours situés au voisinage immédiat d'habitations.

Comme on le constate à l'énoncé des villages de Guémené concernés par ce toponyme, il en existe une certaine concentration, ne particulier dans région la comprise entre le Bot, Juzet et les hameaux au sud-est de Juzet, jusqu'à la rivière du Don.

Il est possible que le toponyme "Chaintre" n'est pas eu en tous lieux la même signification. Sa densité récurrente dans les villages me laisse à croire pourtant qu'il s'agit probablement du terme de viticulture qui est employé, même si la culture de la vigne n'a pas dû être très extensive à Guémené, par le passé. 

Cette dernière assertion peut être tempérée par l'observation que des pieds de vignes sont néanmoins fréquents dans les villages, sur la façade sud des habitations (comme j'ai pu l'observer dans mon enfance à La Hyonnais).

Je finirai donc cette divagation du jour sur cette technique de culture de la vigne qui paraît avoir été inventée au milieu du XIXè siècle dans la commune de Chissay, dans le Loir-et-Cher, par un certain Etienne Denis.



J'emprunte à un ouvrage de l'époque, écrit par un instituteur de cette commune, intitulé "Culture de la vigne en chaintres".

Il s'agit dans une même pièce de terrain de planter des ceps très espacés et de cultiver du fourrage ou des céréales. Le travail de la pièce se fait à la charrue et non à bras comme il conviendrait si les ceps étaient plantés plus drus.

Les vignes se caractérisent par la longueur très importante des sarments qui se déploient bas au-dessus du le sol, soutenus par de petites fourches de bois. Quand vient le moment du charruage, les sarments sont rabattus pour laisser passer les socs.



Il paraît que ce procédé enrichit le brave Père Denis, son inventeur.