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samedi 15 février 2014

La Briqueterie de Langon


J'ai déjà dit tout le bien que m'inspire Beslé, si rempli de souvenirs, qui est la forme radieuse et douce de Guémené : c'est là qu'au terme d'une balade dans la chaleur d'août, nous venions nous désaltérer. La Vilaine, bien sûr, le jardin de l'Hôtel Douard (de l'Union, à cette époque-là ?), les chemins de halage, la quiétude du petit bourg endormi, le café près du pont, la pêche, le pont provisoire...

Et puis aussi l'autre côté du fleuve où nous poussions parfois, lors de nos balades en voiture avec mon père : Langon. 

La première chose qu'on en aperçoit quand on traverse le pont, c'est l'ancien hôtel Sergent, en sentinelle sur la gauche. Puis rien, sinon au bord de la première route à gauche un édifice flanqué d'un haut-fourneau : une briqueterie désaffectée, celle évoquée dans le dernier article.

J'en ai trouvé l'histoire, je vous la rapporte.

Cette briqueterie a porté plusieurs noms : Briqueterie Bignon et Cie, Briqueterie Sergent (ou Segent), Briqueterie d'Aucfer et de Langon, Briqueterie Barreau, selon les propriétaires successifs.

Son implantation ne doit rien au hasard : l'argile du lit de la Vilaine a favorisé dans cette zone une activité importante de briquetage et de tuilerie dès l'époque romaine, en particulier près de l'Étier qui se situe à 600 mètres à l'est du bourg.

L’Étier est un ancien bras de la Vilaine, long d'un kilomètre et large de cent mètres. On y a trouvé des briques à rebords et une tradition prétend qu'il fut creusé pour extraire de la terre à briques (une ville appelée Langun ou Langueur y aurait été engloutie en punition des crimes de ses habitants. On l’appelait au Moyen-Age "étier de Henleix" ou "de Heinlé").

L'usine est construite à l'entrée du Marais de Rosidel à environ 500 mètres de l'habitation la plus proche.



Elle est fondée vers 1880. Elle appartient alors à la Société Bignon et Cie. Vers 1900, elle est dirigée par la famille Segent (ou Sergent : au lieu-dit la Drionnais demeure un certain Joseph Sergent, briquetier). 

En 1903, elle dépend de la société anonyme des Briqueteries d'Aucfer et de Langon, constituée au capital de 113 000 francs. Aucfer est une région marécageuse dans la partie ouest de Redon. 

A partir de 1926, la briqueterie est dirigée par M. Barreau père. En 1930, ce dernier fait construire une cantine pour les ouvriers (qui n'avaient donc pas le temps de rentrer déjeuner...).

La briqueterie cesse son activité durant la Seconde Guerre mondiale. Mais en 1958, la veuve de M. Barreau et son gendre, M. Saindon, prennent la suite de l'entreprise. 

La production alimente la région, notamment Vannes, Nantes et Rennes (35).

La briqueterie cesse son activité en 1969. Aujourd'hui, les bâtiments font partie d'une propriété privée et la cantine abrite une maison.

Le site employait six ouvriers vers 1880, mais une vingtaine dans les années 1930 - 1960.


Le site est enclos. Les bâtiments d'exploitation ont été partiellement détruits. L'ancien logis patronal, doté d'un étage et de combles, est couvert d'un toit à longs pans en ardoise. Sa façade antérieure est percée de trois travées de baies à arc surbaissé encadrées de brique, la travée centrale étant surmontée d'une lucarne.

Le logis est flanqué, sur l'un de ses pignons, d'une partie de l'atelier de fabrication, lui même accolé à l'ancienne cantine qui compte un étage couvert d'un toit à longs pans en tuiles.

L'atelier de fabrication, en rez-de-chaussée, construit en bardage de planches, abrite le four toujours en place, ainsi que le séchoir. Une importante charpente en bois supporte une couverture à longs pans en tuiles.


La cheminée d'usine en briques se dresse à proximité de l'ancien bureau, petit corps de bâtiment construit en briques et couvert d'un appentis en tuiles.

En 1901, une chaudière à vapeur, construite à Nantes par Lebrun et Cormerais, entrepreneurs chauffagistes, est attestée.

En 1910, la briqueterie est munie d'un four à feu continu dit "système Hoffmann-Simon", alimenté à la houille. L'argile, creusée dans les marais, est malaxée, puis moulée et séchée, pour être cuite à 1 800 °C.


Inventé en 1858, le four Hoffmann est le premier four à fonctionnement continu. C'est un four circulaire à foyer mobile : le feu, alimenté par du charbon grâce à des orifices percés dans la voûte, circule constamment et successivement dans tous les espaces de la galerie en forme d'anneau.

Cette dernière est distribuée par des portes latérales servant à l'enfournement et au défournement ; elle est reliée à une cheminée.

Dans ce système, les produits enfournés sont préchauffés à l'approche du feu, cuits en sa présence puis refroidis lorsqu'il s'éloigne. Les produits refroidis sont défournés, tandis que d'autres cuisent et que d'autres encore sont enfournés. Ce four fonctionne ainsi de manière ininterrompue, durant des années parfois.

La variante
Hoffmann-Simon, en activité à Langon, est de plan rectangulaire et de taille plus modeste ; elle est constituée de deux galeries parallèles réunies à leurs extrémités.

Pour limiter la pollution, les gaz traversent horizontalement une épaisseur de 20 mètres de briques placées en claire-voie dans un double tunnel, puis suivent un canal vertical de 2 mètres et prennent alors un conduit horizontal de 30 mètres pour gagner enfin la cheminée haute de 28 à 30 mètres.



La carte postale reproduite ci-dessus est issue de ma petite collection. Mais on trouve plusieurs photos sur le site Glad, consacrée au patrimoine de la Région Bretagne, sur lequel j'ai par ailleurs puisé une bonne part des éléments de cet article.

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