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dimanche 29 septembre 2013

L'orgue de Guémené, ce chef-d'oeuvre


On ne peut pas ne pas évoquer l'orgue de l'église de Guémené dans un blog consacré aux divers patrimoines de cette commune. J'ai toutefois longtemps différé cette entreprise car n'étant pas musicien,  j'avais un peu peur de m'y fourvoyer. Mais je ne doute pas que votre vigilance corrigera mes erreurs.

Guémené a la chance de posséder un très bel instrument signé d'un des plus grands facteurs d'orgues au monde. Une fois de plus, on mesure, au détour de cet épisode, que le clergé et les Guémenois qui s'impliquaient dans la vie matérielle de la paroisse au XIXème siècle, savaient faire montre de goût, recourant aux artistes et aux artisans parmi les plus réputés et les plus experts de leur temps.

Le 6 mai 1856, l'instrument, conçu par Aristide Cavaillé-Coll, fut livré à la paroisse où il prit place dans l'ancienne église située à l'emplacement de l'actuelle Place Simon. De tous les orgues sortis des mains du facteur d'orgues parisien d'origine toulousaine, c'est l'un des plus petit.

Le curé de Guémené était à l'époque René Daniel. Ce prêtre resta vingt ans dans cette paroisse (de 1839 à 1859). Il finit sa vie en 1887 à la Maison du Bon Pasteur à Nantes, du côté de l'église Saint-Donatien, mais fut inhumé dans le cimetière de Guémené : son orgue, peut-on espérer, retentit donc à ses obsèques.

Ce curé trouvait l'orgue décidément un peu trop petit. Cavaillé-Coll lui répondit qu'il n'y avait pas de problème à en faire un plus grand et à trouver un acquéreur de substitution pour cet instrument, n'était que l'église était trop exiguë pour accueillir un orgue plus imposant. On en resta là et l'orgue fut payé 3.000 francs (peut-être 12.000 euros).

Si Cavaillé-Coll était bien en relation avec son client, il est cependant probable que l'orgue ne sortit pas de l'atelier parisien du maître, rue de Vaugirard à Paris, mais fut fabriqué par un autre facteur d'orgues, Pierre Ménard, dont l'atelier était à Coutances, lequel se conforma aux plans du modèle de son éminent collègue.

Aristide Cavaillé-Coll, parcourut le XIXème siècle puisqu'il mourut en 1899, âgé de 88 ans. Le répertoire des instruments issus de son atelier compte près de 700 entrées concernant aussi bien des grands orgues de cathédrales, que des orgues plus petits, de choeur, de salon ou d'accompagnement. Il fut non seulement un facteur prodigue, sollicité en France mais également à l'étranger, mais aussi un artiste ingénieux, inventant divers dispositifs permettant d'améliorer son art.

C'est donc un grand honneur que de disposer d'un exemplaire sous sa signature à Guémené, dans une région où il est peu représenté, un facteur d'orgues nantais (Louis Debierre) y ayant exercé alors un quasi monopole.

L'orgue de Guémené est donc un petit orgue de choeur, en excellent état de conservation. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une restauration en 1999 par Bernard Hurvy, facteur d'orgues nantais.

L'instrument comporte un clavier manuel de 54 notes plaquées ivoire (les dièses sont en ébène) ainsi qu'un pédalier de 18 notes.

Les orgues se caractérisent en particulier par le nombre de "jeux" dont ils sont pourvus. Un "jeu" correspond à un ton, une musicalité propre. Chaque jeu est formé de 54 tuyaux correspondant aux 54 notes du clavier. L'orgue de Guémené ne comprenant que cinq jeux, il dispose donc de 270 tuyaux (en étain, poinçonnés).

Ces jeux portent des noms étranges pour les profanes : Bourdon 8, Flûte harmonique 8, Prestant 4, Doublette 2, Hautbois 8...Les chiffres figurant à côté des timbres font référence à la hauteur des tuyaux (en pieds...) et donc, pour un timbre donné, à la hauteur d'octave à laquelle on joue. Mais je m'égare dans un domaine peu sûr pour moi...

Quand on regarde la console de l'orgue de Guémené, c'est-à-dire la partie de l'orgue où s'assoit l'organiste, on aperçoit huit "boutons" de porcelaine qui portent des noms de jeux, et que l'on peut tirer ou pousser. En actionnant ces "tirettes" (qui s'appellent d'ailleurs des "tirants de registre") l'organiste choisit les jeux, les timbres musicaux, dont il a besoin pour exécuter l'oeuvre (ce choix est appelé la registration). La registration peut d'ailleurs être laissée par l'auteur de la pièce de musique à l'appréciation de l’interprète.

La restauration de l'instrument en 1999 (qui coûta près de 30.000 euros) fut l'occasion d'un grand concert dont il n'y a pas de trace sonore à ma connaissance, mais des documents en gardent cependant le souvenir : ci-après un compte-rendu de cet événement dans Ouest-France et une reproduction de l'invitation.







Si Guémené à la chance de posséder un orgue de grande qualité, il a surtout la chance d'avoir un organiste attitré dont on peut apprécier les talents lors des cérémonies religieuses de la paroisse. J'ai déjà mentionné cet ami à propos d'un concert organisé en mai de l'année dernière en l'église de Beslé.

Il a bien voulu, de sa propre initiative, prêter son concours aux journées du patrimoine 2013, leur donnant, de ce fait, un éclat original. Ainsi, le dimanche 15 septembre dernier, à partir de 14 heures, il accueillit les visiteurs dans l'église grande ouverte où résonnait sa virtuosité. Écoutons :


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