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dimanche 28 octobre 2012

Des grous et des couleurs…


Ma mère se souvient avoir vu sa mère à elle, ma Grand-mère Gustine donc, manger des grous.

Par la tournure de sa phrase, il s’en déduit qu’on n’en mangeait plus guère après la Guerre et d’ailleurs je n’en ai jamais entendu parler dans mon enfance.

Pour en avoir le cœur net, j’ai mené des recherches, et j’ai fini par trouver des petites choses sur la questions des grous.

Les grous sont liés à l’usage du sarrasin.

Voici donc, après un petit rappel sur cette plante, quelques éléments de recettes sur les grous.

Bien qu'il soit considéré comme tel dans l'utilisation qu’on en fait, le sarrasin n'étant pas une céréale, il n’est donc pas une variété de blé, même s'il est aussi appelé blé noir, parfois blé de barbarie (on le trouve aussi sous l’appellation « bucail » ou « bucaille »). 

Le sarrasin est une plante de la famille des polygonacées qui compte dans ses rangs l'oseille et la rhubarbe. Elle est originaire de l'Asie centrale et était très consommée par la population musulmane d'Orient. D'où son nom de Sarrasin.

Le sarrasin est cultivé en Europe depuis la fin du 14ème siècle.

Ses grains très foncés donnent, une fois moulus, une farine grise finement piquetée de noir.

Le sarrasin est resté une des bases de l'alimentation en Bretagne et en Normandie jusqu'à la fin du 19ème siècle, ainsi que dans le nord et l'est de l'Europe.

La consommation à base de sarrasin la plus connue est bien entendu celle de la galette.

Quand on décidait d’en faire, on préparait parfois beaucoup de pâte. Le premier jour, on fabriquait effectivement des galettes.

Puis le second jour, on prenait le restant de la pâte et on le cuisait. La bouillie s’épaississait à la cuisson que l’on arrêtait quand la consistance en devenait suffisante. On servait cette préparation dans son récipient de cuisson, en ayant fait un creux au milieu de la pâte cuite, où l’on déposait une grosse noix de beurre (salé bien entendu).

Chacun venait alors prendre une cuillerée de bouillie qu’il trempait dans le beurre fondu. Un petit coup de cidre là-dessus pour faire descendre…

S’il restait de cette « pâtée », on se gardait bien de la jeter et on la mettait de côté pour le lendemain…

Le troisième jour ainsi, on découpait des petits morceaux de grous. Puis on les mettait à « fricasser » dans une poêle. Ils servaient par exemple d’accompagnement à un morceau de viande ou de saucisse.

J’ai déjà évoqué dans un post précédent l’ouvrage du grand Paul Sébillot intitulé « Coutumes populaires de la Haute-Bretagne », ouvrage anthropologique de grande qualité et de grande rigueur paru en 1886. Ce libre traite surtout des us et coutumes du pays Gallo d’Ile-et-Vilaine, mais on y retrouve bien des descriptions d’usages en vigueur par chez nous encore au milieu du XXème siècle, voire plus récemment.

Il consacre notamment un chapitre aux habitudes de table des paysans gallos (il appelle cela les mœurs « épulaires », et j’ai appris ce mot…). En voici quelques extraits relatifs aux galettes et aux grous dont ma mère m’a signalé avoir été témoin :

« C’est ordinairement la maîtresse de la ferme qui est chargée de la fabrication de la galette, et au moment des grands travaux, elle s’y prend dès la veille. La personne chargée de la galette ne se dérange pas, en général. En certains pays, elle est presque constamment à genoux ; ailleurs elle est assise.

La pâte est versée au moyen d’une écuelle sur une plaque ronde en fer battu,qu’on nomme […] galetier. [] On l’étend à l’aide d’un petit râteau de bois qui porte le nom de rouable.

[…] On pose [les galettes cuites] sur une sorte de gril en bois placé sur la table de la ferme, et qui s’appelle hèche ; une héchée, c’est l’ensemble des galettes qui ont été préparées par la femme chargée de ce soin.

C’est sur la héchée que les gens de la ferme viennent prendre les galettes ; s’ils les mangent avec du lait, ils les déchirent avec les mains et les mettent dans le lait, toutes chaudes ; cela fait une espèce de potage.

On beurre aussi les galettes, et on les mange sans apprêt.

Lorsqu’elles sont froides, on les réchauffe sur la poêle « à la tripe », c’est-à-dire en morceaux ou entières, avec du beurre roux, ou simplement sur le trépied ou sur les charbons. On s’en sert en guise de pain pour manger de la viande froide, surtout du lard, de la saucisse chaude, ou des pommes cuites.

On casse aussi des œufs, et on les jette sur la galette à moitié cuite, où ils forment une sorte d’omelette.

[…] La bouillie de blé noir, suivant les pays, s’appelle grous, lites, peux. Ce mot est toujours employé au pluriel.

Elle se compose de farine de blé noir, délayée dans de l’eau, avec un peu de sel ; on la remue pendant un quart d’heure. On dit que pour être bien cuits les grous doivent vêner (vesser), c’est-à-dire éclater, neuf fois.

[…] Comme toutes les bouillies, celle de blé noir est mangée habituellement dans le vase où elle a été faite : c’est une casserole ou un bassin. Au milieu on met à fondre un morceau de beurre, où chacun vient tremper sa cuillerée de bouillie.

On en prend aussi des morceaux de la grosseur d’un œuf, et on les met dans une écuellée de lait, soit doux, soit baratté, soit dans du lait cuit.

On fait aussi frire dans la poêle des tranches de bouillie froide, qui sont coupées en carré ou tranches minces qui rappelaient assez par leur forme des petites soles. Aussi les nomme-t-on plaisamment des « soles de guéret ». »


Je voudrais conclure ce long post par un souvenir personnel qui se veut un hommage.

Quand j’étais enfant, La Hyonnais où nous demeurions se trouvant à un bon gros kilomètre du Bourg, j’allais à vélo faire les courses (le pain avec un tendeur sur le porte-bagages, le reste dans les sacoches). On achetait les galettes toujours au même endroit, c’est-à-dire chez Odette Leroux, rue de la Poste, entre la rue de Mirette et la rue de Beslé, en face de la rue de la Chevauchardais.

Je ne sais si quelqu’un se souvient d’Odette Leroux. C’était une vieille dame à la retraite, douce, avec des lunettes et des cheveux gris blancs ondulés, une sorte de mamie Nova des galettes. Elle avait une petite voix fluette du genre à aimer les enfants. Je n’y étais pas insensible. D’ailleurs, je ne l’ai pas oubliée.

Elle faisait son métier de galettière chez elle. On montait deux marches, peut-être, et on se retrouvait, passée une petite entrée, dans son petit temple du blé noir. La pâte était dans une « jatte » dont le nom m’a toujours semblé si approprié, sait-on pourquoi, à ces récipients de terre vernissés.

Il fallait attendre un peu pour la commande. Je n’ai pas le souvenir que c’était parce qu’il y avait du monde, mais probablement parce qu’elle faisait les galettes à la demande. Mais cette attente était compensée par son babil perché et l’odeur chaude et prometteuse des galettes sur la pierre du réchaud à gaz.

Il n’y a plus d’Odette Leroux. Voici cependant des adresses de sites où l’on trouve des recettes de grous :




Bon appétit !

samedi 27 octobre 2012

La Résistance à Beslé.


J'ai trouvé sur Internet un petit fascicule qui relate, de la main même de ceux qui en furent les héros, les faits de Résistance survenus dans notre région, et plus particulièrement à Beslé.

Ces notes, publiées en 1985 par des membres de l'Amicale des Anciens du 2e Bataillon F.T.P.F.-F.F.I. de Loire-Inférieure, permet d'éclairer l'héroïsme ordinaire de certains de nos concitoyens.

J'ai choisi, à peu de corrections près, d'en donner le texte comme je l'ai trouvé. J'y ai ajouté une anecdote produite dans le même ouvrage, qui me paraît conclure parfaitement cette petite histoire, et qui, par ailleurs, évoque Guémené. Voici :


Le groupe de résistance de Beslé-sur-Vilaine est camouflé au début dans le bourg de Beslé, puis à la ferme de Boudafay, chez Mme veuve Letort, et surtout à la ferme des Martinais, protégée par des tranchées (abri chez Mme Martin Valen­tine).

Les principales activité du groupe consistaient en :


hébergement de camarades en illégalité et de chefs de la Résistance, parmi lesquels : Jean Le Gal (Jean), responsable d'Ille-et-vilaine ; Charles Le Joncour, adjoint au Docteur Le Janne ; Louis Pétri, Commandant de Rennes.

- diffusion de tracts, confection de fausses cartes d'identité, vol de carburant à l'ennemi, entrepôt d'armes et d'explosifs ;


- sabotages des voies ferrées. Beslé-sur-Vilaine étant un centre ferroviaire limitrophe de l'Ille-et-Vilaine et du Morbihan, les activités du groupe se sont étendues à plusieurs départements. 

Les messages de la B. B. C. pour le secteur : "Les lunettes sont en bois" et "Le camion est en panne", la veille du débarquement, étaient les mots d'ordre des sabotages des lignes de chemin de fer :

Guer - Rennes ;
Rennes - Beslé ; 
Guer - Messac ; 
Guer - Ploërmel ; 
Messac – Rennes ; 
Beslé - Redon ; 
Messac - Questembert.

L'objectif fixé par le Q.G. de Londres était de paralyser tous les "panzer" cantonnés autour de Guer (50km au Nord-Ouest de Beslé), dont le transport par chemin de fer avait été prévu pour des raisons de rapidité et d'économie de carburant.

Les sabotages ont obtenu un plein succès, puisque les colonnes blindées mirent 9 jours pour se rendre sur les zones de combat :

- sabotages des signaux et des téléphones de la gare de Beslé ;
- sabotages répétés de la ligne à haute tension Pontchateau-Rennes (les sous-marins allemands ne pouvaient plus recharger leurs batteries). 

Le 17 juin 1944, les allemands font une rafle à Beslé. La majorité des résistants y échappa. Malheureusement, plusieurs furent arrêtés, dont deux déportés : M. Baudu et M. Danet.

Les allemands défoncèrent les portes chez les parents de Pierre Pinel et firent la fouille de la mai­son. Ensuite ils se rendirent à l'hôpital du Docteur Gentin à St Gildas des Bois pour arrêter Pierre Pinel. Ce dernier venait de s'échapper.

Il faut noter l'acte de Marcel Roumagère, se portant au devant d'une colonne de chars américains afin de leur éviter de sauter en arrivant au pont de Beslé.

Le nettoyage de la région fut effectué par le groupe, les prisonniers allemands étant remis à une pointe avancée de l'armée américaine à Derval.

Le ler août 1944, le groupe de Beslé rejoint le 2e Bataillon F.T.P.-­F.F.I. en formation à Nort-sur-Erdre.

Les opérations du groupe seront ensuite celles du 2e Bataillon :

- secteur du Gâvre, la Maillardais, la Madeleine jusqu'à fin septembre 1944 ; 
- secteur de Fégréac, Beaulieu, Bonvallon, Vieille-Ville (octobre 1944) ; secteur du Dreny, les Noëls, Beauvallon : fin octobre 1944 à fin janvier 1945 ; - Nantes : début à fin février 1945. 

Ceux qui le désirèrent, signèrent un engagement pour la durée de la guerre. La plupart des anciens du 2e Bataillon vont ainsi former la 3e Compagnie du 91e Bataillon du Génie divisionnaire.

La 3e Compagnie prendra position en ligne (sous-secteur Sud-­Loire, Vue, Buzay, les Rivières, le Pé de l'Ile ) tenue jusqu'à la mi-mai 1945 ( !), car des allemands tentent de quitter la "Poche de St-Nazaire" pour ne pas être faits prisonniers. 

Relevé fin décembre 1944, le 2e bataillon alla stationner début 1945 à Guémené. Il en partit pour Nantes ensuite, en cars, à destination de la caserne Cambronne, Place Waldeck Rousseau.

Les cars s’arrêtèrent au pont de Cens dans le Nord de Nantes. Les hommes en descendirent et défilèrent à pied jusqu’à leur destination finale. Ils avaient fière allure avec leurs sabots et leurs tenues de toute sorte. 

Un passant les dénomma « les va-nu-pieds superbes ».

Moulins et moulinets à Beslé


En quittant Beslé par le sud, si l’on tourne à gauche à hauteur du cimetière et qu’on longe la route vers le lieu-dit la Grenouillère, on peut atteindre un vieux moulin près d’un bosquet.

De même, en quittant Beslé par la route de Pierric, à 300 mètres vers le hameau de Richebourg, une route part à droite vers la butte de Plaisance où trône un autre moulin.

Les chemins sont différents, mais 150 mètres seulement séparent les deux édifices.



Un inventaire fiscal de 1836 permets de connaître les différents bâtiments importants que comptait Guémené à cette époque. Des deux moulins, un seul est mentionné, un seul fonctionnait donc (existait ? ) à ce moment : celui de la Grenouillère. Il est donc à présumer que celui de Plaisance est postérieur.

Pourtant, le pauvre Grenouillère eut à subir la loi de l’imposant Plaisance. C’est à vrai dire ce que colporte la rumeur. On raconte en effet que les ailes du premier furent démontées à la demande du meunier de Plaisance.

Ce meunier devait avoir le bras non moins long que les ailes de son moulin, car il aurait réussi à faire valoir auprès du Comte (?) que les ailes du moulin de la Grenouillère lui volait son vent…On imagine les échanges entre voisins...

Tout cela sent bien entendu sa légende : d’ailleurs, une carte postale datant du début du siècle dernier, révèle  l’édifice dans sa blanche splendeur ailée…

Et d’ailleurs Grenouillère eut sa revanche en quelque sorte : la même carte postale montre en fait l’entrée de la mine d’or qui se trouve au pied de ce moulin et dont l’exploitation fut entreprise par des allemands avant 1914.

Cela est à voir page 114 d’un ouvrage intitulé « les perrayeurs » (évoqué dans un post récent), que l’on peut se procurer à l’Office du tourisme de Guémené (notamment). S’il vous tombe dans les mains, vous pourrez apprécier à la même page, un poème intitulé comme il se doit  « les ailes brisées », traitant de la douloureuse légende du moulin mutilé de Grenouillère que, toujours à l’affût des curiosités littéraires, je recommande à votre lecture.

Composé en 1991 par le maire divers droite de Moisdon-la-Rivière, en goguette vers Beslé, ce poème en alexandrins de mirliton dédié au curé de Marsac (!), exprime en vérité que ce magistrat municipal était probablement plus doué pour inaugurer les chrysanthèmes que pour la poésie.

Comme quoi, le moulin à paroles n’est jamais bien loin du moulin à vent…

Je joins ci-dessous un lien vers le site intéressant d’un particulier qui parcourt la France en quête de ses moulins et sur lequel on peut voir des photos des deux moulins "rivaux "de Beslé :


J'ajoute une photo de mon cru représentant de loin hélas, l'actuel moulin de Plaisance.


Bon vent !

dimanche 21 octobre 2012

Prosper, youp' la boum !


Peut-être ne connaissez-vous pas Prosper de Boisfleury. 

Moi non plus, en fait. Et il ne serait resté à jamais qu'un voisin de cimetière (une vieille tombe avec une grande pierre de schiste bleu par dessus, où s'efface gentiment le souvenir gravé de Prosper) sans J. H., aimable guémenoise et lectrice du blog qui a attiré mon attention, cet été, sur les exploits de ce brave homme. Je la salue chaleureusement, au passage.

Car Prosper (Pierre-Prosper), véritable Janus, avait deux visages ou plutôt deux casquettes : d'un côté, un paisible notable chargé d'administrer une justice de proximité en toute bénignité ; de l'autre, un terrible chasseur, le Nemrod des bords du Don.

Qu'on en juge, si j'ose dire.

Prosper est né en 1801 au château de Boisfleury où il est mort, d'ailleurs, en févier 1869. Marié, il a deux enfants, dont Arthur qui vivra quasi centenaire et que ma mère a connu dans son enfance (il lui parlait de l'Action Française...). 

Juge de Paix du canton de Guémené, il avait à ce titre pour principale mission de régler les litiges de la vie quotidienne. L'accès à la fonction ne nécessitait aucune qualification particulière en droit (c'est commode) : on y retrouvait (paraît-il) des personnes dotées d'une autorité morale et d'une situation sociale établies (bon point pour Prosper). Cette justice, issue de la Révolution, vient remplacer la justice seigneuriale abolie (rien ne se perd, tout se transforme).

Sans doute ce "travail" lui laissait-il un peu de temps libre. Car le nom de Prosper est passé à la postérité (relative) en raison de ses exploits de chasseur de loups.

A l'extrême fin du 18ème siècle, on recensait encore 167 loups dans notre Loire-Inférieure (28 loups, 28 louves, 111 louveteaux, précision qui laisse rêveur...), ce qui semble énorme par rapport aux chiffres beaucoup plus faibles des départements limitrophes.

On ne peut pas dire que c'est la faute à Prosper : en effet, non content d'éradiquer les litiges de voisinage, il aurait tué dans la seule année 1838, à lui seul, 39 de ces animaux qui hantèrent l'imaginaire de nos ancêtres. Diantre !

Mais le plus beau reste à venir.

Un beau jour d'hiver, Prosper part dans la lande chevaucher avec sa meute et son fusil. Ses chiens débusquent un de ces animaux de légende. La chasse commence. Dix heures durant Prosper fend les fourrés d'ajoncs et d'épines acérées. Enfin, le loup est acculé. Il fait face. Prosper l'ajuste avec son fusil. Mais le coup ne part pas. Le nouveau Nemrod se débarrasse de son arme. Mais il a perdu son poignard. N'écoutant que son courage, il se jette sur la bête. S'ensuit un corps à corps furieux. Le chasseur prend l'animal à la gorge, l'étouffe, il lui martèle le poitrail de son genoux, les haleines fumantes de l'homme et de la bête se mélangent. Enfin la bête succombe. Prosper en sang et en haillons se relève vainqueur.

On voit bien le retour au château de Boisfleury et les tartarinades qui s'ensuivirent.

Un livre, "Les Cavaliers du Gâvre" paru en 1992, narre cette anecdote et d'autres encore. 

A signaler qu'il existe également un autre ouvrage qui met en scène les exploits cynégétiques d'un Boisfleury : "De meute à mort : Carnets de chasse d'un veneur, Henry de Boisfleury, 1840-1908". Espérons qu'il n'ait pas tué un éléphant avec ses seules dents...

dimanche 14 octobre 2012

Place aux Simon (2) : Fidèle II


J’ai envie de parler aujourd’hui de Fidèle II Simon. « II », car il est le fils de son père Fidèle 1er Simon qui fut maire de Guémené, comme le père de celui-ci, François fondateur de la dynastie. J’ai évoqué la vie et l’œuvre de ce dernier dans un post récent.

Fidèle Simon deuxième du prénom est né à Guémené-Penfao le 6 août 1837.

Contrairement à ses deux ancêtres, Fidèle II va finir sa vie politique comme maire de Guémené et non la commencer.

Après la chute du Second Empire en 1870, en effet, vierge de tout mandat, il va représenter à l’Assemblée Nationale française le département de la Loire-Inférieure consécutivement aux élections du 8 février 1871. Il sera ensuite député de 1876 à 1885, puis en 1889.

Il entre donc dans la carrière à 34 ans. Jusque là, il n’est pas resté manchot : de son ordinaire, Fidèle II était en effet marchand de bois et propriétaire (ce dernier statut paraissant - à l’époque - un métier)

Son premier succès politique ne laissait présager d’aucune carrière politique brillante. Elu dernier de sa liste, un journal (l’Union Bretonne) favorable au régime bonapartiste déchu avait fait campagne pour lui !

Il prit place au centre gauche (ce qui ne mange pas de pain) et, partisan de Thiers, vota pour la paix avec l’Allemagne de Bismarck, à l’instar des autres républicains modérés.

Il vota paraît-il  aussi pour la « pétition des évêques » tentative pour venir militairement restaurer le pouvoir temporel du Pape à Rome (très catho quand même, le Fidèle II). Il se prononça aussi contre le service de trois ans, contre la démission de Thiers, contre le septennat, contre le ministère de Broglie, pour l'amendement Wallon et pour les lois constitutionnelles.

Bref, on ne sait plus trop quels étaient les enjeux de tout cela, mais on peut dire qu’il se trouva présent à un moment crucial du rétablissement du régime républicain en France, lequel devait durer 70 ans.

Ainsi, lors des tentatives de restauration monarchique, il avait déclaré, dans une lettre à ses électeurs, « qu'il s'opposerait énergiquement à la restauration de la monarchie traditionnelle ». La tournure de la phrase laisse quand même entendre que s’il s’était agi d’une monarchie non traditionnelle, alors peut-être…

Parallèlement à son activité au Parlement, il fut Conseiller général du canton de Saint-Nazaire fin 1871. Il rata le Sénat en 1876, mais regagna l’Assemblée peu après.

Réélu le 28 octobre 1877 et le 21 août 1881, il siégea au sein de la Gauche Républicaine et il soutint la politique scolaire et coloniale du gouvernement.

Sur une liste républicaine toujours, il échoua à se faire à nouveau réélire le 4 octobre 1885 où toute la liste conservatrice de son département fut élue, et aux élections sénatoriales de 1886 comme à celles de 1879.

Fidèle Simon décide alors de ne plus se représenter.

Il se fait cependant élire maire de Guémené en 1888. Il le restera jusqu’en 1904.

Pourtant, en 1889, « cédant aux instances d'un très grand nombre de républicains », il se porte à nouveau candidat dans la 1ère circonscription de Saint-Nazaire, sollicitant des électeurs un cinquième mandat législatif « pour défendre la République menacée par la coalition révisionniste », République qu'il a contribué à fonder en 1875 et qu’il a défendue.

Le 12 septembre 1889, il n'obtient que 6.088 voix contre 7.358 à Maillard, candidat conservateur. Mais au second tour de scrutin, le 6 octobre, il l'emporte - de justesse il est vrai - sur son concurrent par 8.458 suffrages contre 8.452 sur 17.003 votants. Génial !

Siégeant comme jadis sur les bancs de la Gauche Républicaine, il est nommé membre de diverses commissions et présente plusieurs rapports sur des projets mineurs et intéressant surtout son département.

En 1893, Fidèle Simon ne se représente définitivement pas. Retiré de la vie politique, y compris locale à partir de 1904, il meurt à Pléchatel (Ille-et-Vilaine) le 5 mai 1911.

Marié à Caroline Perrin, il était le père d’Adolphe Simon, maire de Guémené après son père et jusqu’en 1919, qui clora la saga politique familiale.

En guise de dessert, appréciez donc la bouille de Fidèle modéré :



dimanche 7 octobre 2012

Rentrée littéraire guémenoise (3)


Le livre dont je fais la brève revue aujourd’hui est d'une nature différente des deux dont j'ai parlé récemment. Il s'agit non plus d'un roman, mais d'un ouvrage de souvenirs en quelque sorte, autour des carrières de schistes de Pierric. Il y a tellement de pierres bleues dans les constructions de Guémené qu'il ne me semble pas trahir ce blog en évoquant cette commune.

L'ouvrage est consacré à l'exploitation des mines de schiste de Pierric dont les ouvriers étaient appelés "perrayeurs". On trouve la trace de ces perrayeurs au XVIIème siècle déjà, et même avant sans doute. Les mines de Pierric étaient en sous-sol et non à ciel ouvert. On distinguait les ouvriers du fond qui extrayaient le minéral, de ceux qui en surface taillaient les pierres pour en faire des ardoises.  Il suffisait de disposer d'un terrain pour ouvrir une carrière pour peu qu'il se situe à l'aplomb de la bande schiste qui, d'Angers, poursuit son chemin vers l'Ouest, traverse Pierric, puis Beslé à la hauteur de la Grenouillère et de son moulin.

L'ouvrage, disponible à l'Office du Tourisme de Guémené, Place Simon, est un gros livre broché et abondamment illustré.

Il comprend un fouillis de choses, ce qui le rend intéressant, mais assez mal fagoté, peu maîtrisé.

Il y a d'abord un court roman d'amour sur fond de carrières et de vie rurale, au début des années 20 du siècle passé, qui a pour auteur un parent des promoteurs de l'ouvrage dont je parle. Disons que le texte vaut surtout pour la description du déroulement d'une noce, au dernier chapitre, qui doit ressembler à celle de ma Grand-mère Gustine, à la même époque.

Il y a ensuite tout le matériel documentaire et iconographique réuni autour des mines : leurs sites, leur fonctionnement, leur arrêt....On s'égare parfois dans l'abondance, le détail et la répétition.

Le propos s'élargit à tout bout de champ. On évoque Pierric, ses commerçants, les activités rurales, etc...

Bref, il faut regarder les photos qui sont très nombreuses et souvent passionnantes.


Les perrayeurs, par Alphonse Leparoux, 2010,  222 pages, 35 €
Tome 1, Editions Au coeur de nos racines

Grand-mère 105 ans ?


Quand ma Grand-mère Gustine a eu 100 ans, l'un de mes jeunes fils utilisait l'expression "Grand-mère 100 ans", comme s'il s'agissait d'un nom.

J'ai retrouvé l'extrait de journal ci-dessous qui évoque sa 105ème année, paru quelques mois avant sa disparition puisqu'elle n'atteignit pas les 105 ans, et qui sent le Ouest-France à plein nez.

Y-a-t-il un mérite à vivre plus longtemps que tout le monde ? Voilà me semble-t-il la première question que pose ce petit texte.

Pourquoi faut-il attendre tant d'année pour connaître la vie des gens qui vous sont proches ? Voilà la seconde question que soulève les éléments biographiques précis que j'ai parfois découverts à sa lecture.



Au moment où paraît cet article, Grand-mère Gustine est bien fatiguée et peu consciente. Les quelques fois où je l'ai vue alors, dans sa chambre de la maison de retraite de la Grée-Caillette, elle n'était plus que l'ombre d'elle-même, un paquet humain, bien loin de la gaillarde vieillarde qui pratiquement au même âge lisait son journal sans lunettes et dont l'oeil pétillait à l'arrivée d'une visite. Non, l'oeil ne pétillait plus du tout.

Peut-être, je ne sais, y-a-t-il une forme d'exploit à survivre aux épreuves de la vie : à la pauvreté, à l'absence d'hygiène, à l'alcoolisme ambiant, à la guerre, aux accouchement répétés...

Mais je crois que deux choses ont fait sa longévité : la chance de disposer de la santé jointe à un entrainement du corps par un travail physique, prolongé et intense (travaux des champs, travail de lavandière, garde d'enfants, ...) ; et, par ailleurs, l'insouciance du monde.

Si l'on a peu de mérite à devoir travailler et à éviter les maladies, il y a certainement une forme de philosophie pratique de la vie qui l'a préservée de tout. Lire les morts du jour dans le journal, causer avec son amie Bertine en sirotant des cerises à l'eau-de-vie (caouseu u-m' ptit), regarder les chansons à la télé, prendre son bonbon du soir, tartiner son camembert avec du beurre salé, écrire les cartes de bonne fête aux petits-enfants en scotchant un billet...Le monde et son agitation ont glissé sur elle, comme elle a glissé sur le monde qui n'était au fond qu'une vague sur laquelle il suffisait de surfer sans effort intellectuel.

Cette apathie au monde, cette absence de révolte et de réflexion critique, ce renoncement et cette soumission aux lois même les plus communes, sont assez éloignés de ma façon de penser. Grand-mère Gustine, comme bien des femmes et des hommes de son époque, n'est sous ce rapport pas un exemple pour moi.

Je ne peux pas dire non plus que j'ai beaucoup parlé avec elle en dépit des 43 années de recouvrement de nos existences : je serai même en peine de rapporter un seul souvenir de cela. Elle ne m'a transmis aucune tradition orale, aucun souvenir familial. Mais il suffit qu'elle soit Guémené pour moi, et elle le sera toujours, pour quelques balades dans les chemins creux de l'époque où, dans un panier d'osier à anse, nous ramassions de "l'herbe pour les lapins".


Le chroniqueur local qui a écrit l'article biographique ne connaissait probablement pas ma famille, et pourtant l'un ou l'autre de ses membres, ma mère peut-être, est allé lui narrer la vie de ma grand-mère, leur vie d'antan, sans rien cacher. Mais quant à moi, on ne m'a jamais rien raconté ! Les familles vivent dans le présent et abolissent parfois le passé comme s'il devait gêner ce présent.

La réalité est souvent sordide, mais c'était l'époque plus que les gens : mes grands-parents n'étaient pas des paysans purs, en somme. Elle, était née au bourg près de la Place Simon de parents qui, fait original et dont on se demande ce qu'il cache, se séparèrent ; lui, avait travaillé comme cocher et avait quitté le pays avant que la guerre de 14 ne le happe.

Puis, il fut employé un temps à la minoterie Lucas aujourd'hui disparue, dont les bâtiments imposants toisaient le vélodrome. Il devait y porter des sacs.

Ils se marièrent dans l'après-guerre, à son retour de captivité. Il en revint traumatisé ainsi que par les horreurs de Verdun où il fut fait prisonnier. Il subit l'hostilité sourde que les veuves, les orphelins et les bonnes gens accordent aux survivants. Il finit sa vie prématurément dans l'alcool et la solitude de l'Hôtel-Dieu de Nantes.

Ils prirent une ferme à L'Epinay où naquirent trois de leur quatre enfants. L'affaire périclita, la maison fut vendue sans doute, et ils atterrirent à La Brûchais de sinistre mémoire (pour ma mère, mais je ne sais pas pourquoi). Puis enfin La Hyonnais où ils vinrent s'entasser avec mon arrière grand-mère Françoise, son chien Papillon et son fils !

En fait, mon grand-père n'a été longtemps qu'un grand portrait souriant et estompé de militaire à moustache, trônant au-dessus du lit de coin de ma grand-mère. On l'époussetait de temps en temps comme on remonte de temps en temps la grande horloge à balancier.

L'autre élément palpable de sa présence a toujours été le chagrin ambivalent qui semblait étreindre ma mère à son évocation. Pas de tombe au cimetière de Guémené. Pas d'hommage à la Toussaint. Le mystère de sa vie et surtout de sa mort était entier. Tant et si bien que j'ai fini par me demander quel acte honteux il avait bien pu commettre pour être ainsi banni des mémoires, des discussions, du cimetière.

Et puis j'ai fini par retrouver sa tombe dans les registres en ligne des décès à l'Hôtel-Dieu de Nantes. Persuadé qu'il avait été enterré dans une fosse commune (ce qui aurait pu constituer, d'un certain point de vue, l'élément honteux de l'histoire), je suis allé au cimetière de son inhumation retrouvée, au petit cimetière St-Jacques de Nantes. J'ai cherché, sous le soleil, le carré J, le rang 4, la fosse 21. Il est probable que j'ai trouvé l'emplacement (photo ci-dessous) : mais pas de Julien Aimé Legendre.



En fait, il fut sans doute enterré dans une tombe normale dont la concession vint à son terme et ne fut pas renouvelée. Ses restes sont dans un ossuaire, autant dire nulle part. Paix, ce n'est pas grave.

samedi 6 octobre 2012

La Chapelle des Lieussaints


L'été dernier, je me suis rendu à la Chapelle Sainte-Anne de Lessaint. Il faisait beau, j'étais avec le plus jeune des mes fils âgé de 18 ans. Je n'étais pas venu moi-même sur ce site depuis une éternité. Ma mère prétend que nous y sommes passés avec mon père, qu'une photo en témoigne, mais je ne l'ai pas retrouvée et cela date de quarante-cinq ou même cinquante ans maintenant.

Malgré la période des vacances et le beau temps, nulle autre personne que nous ne venait troubler la tranquillité du lieu. La Chapelle était ouverte en prévision du pèlerinage du dimanche à venir. Nous avons pu longuement en faire le tour, lire les panneaux explicatifs, regarder les fresques murales, faire des photos.

Je vous propose ces clichés à la fin de ce post.

Pour l'heure, je vous soumets trois textes qui éclairent l'histoire ou la légende de ce lieu. L'un est tiré des 
Annales de Nantes auxquelles j'ai déjà eu recours récemment, l'autre d'un ouvrage de la fin du XIXème siècle. Le dernier provient d'un panonceau explicatif disposé à l'intérieur de la Chapelle.

Le premier texte est assez plan-plan. Il raconte platement la légende du Solitaire de Lessaint et de sa rencontre avec la Duchesse Anne.


A la fin du XVème siècle, le coteau de Lessaints fut le refuge d'un pieux vieillard, vivant solitaire, en la seule compagnie d’une biche apprivoisée.

C'est vers 1480 qu'il était venu se fixer là, n'apportant pour tout bagage que de vieilles hardes, plusieurs manuscrits rédigés et illustrés par lui-même et par les moines de Saint-Sauveur de Redon, puis surtout un coffret de bois magnifiquement ouvragé qu'il cacha dans la ténébreuse caverne de son ermitage.

Chaque matin, il montait à la chapelle et il faisait de longues oraisons, les bras en croix, sans se soucier de ceux qui passaient.

Sur ces entrefaites, Anne de Bretagne fut invitée à Pontveix en Conquereuil par le Seigneur Maxi­milien de La Chenaie. à l'occasion d'une chasse ducale dans la forêt du Gâvre.

A la fin du repas que Maximilien offrit à ses invités, le Solitaire vint demander audience à la Duchesse.

L'après-midi. Anne de Bretagne monta à la chapelle, précédée de la biche de l'ermite qui servait de guide et d'introductrice.

Le Solitaire s'avança porteur de sa précieuse cassette qui contenait des rubis et des émeraudes, des trésors remportés d'Orient par les ancêtres du moine.

Emportez ces joyaux, ma souveraine, dit le vieillard, ce sera pour achever votre cathédrale de Nantes.

La duchesse émerveillée lui promit, qu'en échange, elle lui ferait construire une belle demeure.

Non, répondit le Solitaire, je ne demande qu'une chose, c'est de faire en sorte que les landes qui entourent la chapelle y restent attenantes et n'en puissent être distraites, ni modifiées pour conserver intact le paysage à travers les siècles.

Anne de Bretagne promit et l'ermite, suivi de sa biche, s'en retourna à sa caverne, tout heureux d'avoir rendu service à son pays d'adoption.

L'autre texte est tiré d'un ouvrage de 1898 consacré aux Sept-Saints de Bretagne et aux pèlerinages à eux dédiés en divers endroits. L'auteur (Julien Taverny, assez inconnu au bataillon, par ailleurs) est un écrivain breton du XIXème. Ayant fait le tour des chapelles consacrées aux Sept-Saints en "vraie" Bretagne, il digresse, non sans aigreur, de la manière suivante :

A cette liste de chapelles des Sept-Saints situées dans les limites de leurs anciens diocèses, il faut en ajouter une autre située dans le diocèse de Nantes.

En la commune de Conquereuil (canton de Guémené-Penfao, arrondissement de Saint-Nazaire), près du château de Pont-Veix, au bord même de l'ancienne voie romaine conduisant de Blain vers la Vilaine, il existe une chapelle placée sous le vocable de Sainte Anne, mais nommée autrefois chapelle des Sept-Saints, autrement (par corruption) de Lessaint (les Saints).

On voyait autrefois dans la chapelle sept statuettes en bois, très anciennes, occupant sept niches distinctes  représentant sept saints avec leurs attributs ; mais les noms de ces saints étaient perdus, il y a près d'un demi­ siècle.

A cette époque, vers 1852, la chapelle fut reconstruite avec le goût qui préside d'ordinaire à ces réfections, les sept niches furent supprimées. Il y a vingt ans les statuettes furent offertes à un brocanteur qui n'en voulut pas ; six d'entre elles furent remisées au grenier de la chapelle neuve ; la septième, moins vermoulue que les autres, fut placée dans la choeur de la chapelle où elle figure encore sous le nom de saint Méen. 

Pour le coup, l'histoire est un peu différente de celle qu'on a l'habitude d'entendre...Et le rattachement suggéré à une vraie tradition culturelle bretonne me paraît, d'un point de vue "bretonnant", plus bretonnant que la classique histoire écolo-cucul de la Duchesse Anne et du Solitaire à la biche.

Enfin, chacun voit.

Reste donc le panonceau "officiel" situé dans la chapelle, qui met l'accent sur d'autres aspects historiques.

Le site des Lieux Saints (sic) est un lieu de fréquentation très ancien, dont l'origine n'est pas réellement connue.

Il fut, dans les temps anciens, une frairie, regroupant les villages autour : le Tahun, Les Rivières, la Holtais, la Billiais...

Le site lui-même se serait développé à partir des années 900, par l'action des moines du prieuré de Redon. Ils fondèrent là une léproserie, comprenant un village, avec ses habitations, son cimetière, et son lieu de culte.

Cette chapelle, comme tout lieu de culte de maladrerie (léproserie), est dédié à Sainte Anne.

On ne sait comment ce site a évolué au fil des siècles. Simplement l'on sait qu'en 1835, on recensait ici 6 maisons, situées près de la carrière, et un cimetière. Entre 1963 et 1968, au moment du remembrement, les quelques vestiges ont été définitivement détruits.

Bref, difficile de s'y retrouver...

Maintenant, comme promis vous trouverez ci-après les photos que j'y ai prises. Leur intérêt est bien entendu documentaire. A ma grande surprise, on voit sur les murs intérieurs de l'édifice des peintures assez jolies dans le goût italien du XVème siècle. Elles représentent des scènes de chasses. Elles sont côtoyées d'oeuvres plus faibles que je ne vous montre pas.












Enfin ce qui est sûr, c'est que la visite vaut le coup, ne serait-ce que pour le site qui est fort apaisant.

Place aux Simon (1) : François 1er


La famille des Simon, en tant que dynastie politique locale, a sa place à Guémené et dans ce blog "guémenéo-familial", naturellement.  Et ce d'autant plus d'ailleurs, que bien qu'elles l'aient l'une et l'autre toujours ignoré probablement, cette famille et ma Grand-mère Gustine étaient apparentées.

La trace des Simon est monumentale (à l'échelle de Guémené) : la place Simon, précisément, la plus vaste des places de Guémené si j'en excepte celle de l'Eglise (et encore), donne la mesure de cette empreinte ; la chapelle funéraire qui domine la foule des autres tombes au cimetière, image l'ascension des Simon au-dessus des autres guémenois.

On lit dans les documents qui les évoquent qu'ils furent en tout six maires et trois parlementaires dont la carrière émailla le XIXème siècle, celui qui va de Napoléon 1er à la Guerre de 14.

Le fondateur de cette épopée fut François. Il était né le 25 février 1765, au Bourg de Guémené.

Pendant la Révolution, le jeune François fait partie de ces Soldats de l'an II qui furent appelés en masse, fin 1793, sous les drapeaux tricolores de la jeune République. Selon toute probabilité, il faisait partie de l'Armée des Côtes de Brest qui, sous diverses appellations, opéra en Loire-Inférieure : bataille de Nantes ; campagne contre les Chouans dans le sud du département (Tiffauges, Cholet) ; bataille contre les troupe débarquées à Quiberon en 1795.

On ne sait à quelles opérations précises il participa. Toujours est-il qu'il fut blessé et en resta mutilé.

Sa carrière militaire définitivement obérée, il retrouve au pays Jeanne Orain (mon arrière-grande-cousine !) qu'il a épousée en février 1790.

Installé au Bourg, il tient le bureau de tabac (récompense usuelle des invalides de guerre) et sera aubergiste. Dans les documents, on le présente aussi comme "propriétaire".

Conseiller communal éduqué (il savait écrire correctement) , il est nommé maire de Guémené sous Napoléon 1er (en vendémiaire an XI = septembre 1802) succédant à Prosper Bougot-Vieilleville. Selon certaines sources, il aurait été révoqué après 1815, sous la Restauration royaliste, mais je n'en ai pas trouvé la trace (il officie régulièrement au cours de cette période).

On dit que sa gestion municipale fut appréciée. Il eut notamment à procéder à la vente des terres vaines et vagues, terres que les communes avaient héritées de la confiscation des biens seigneuriaux.

Lui naîtront huit enfants qu'avec son épouse Jeanne, "mère de famille dévouée, excessivement économe et travailleuse", il fit, semble-t-il, instruire.

Il s'éteignit le 11 mai 1821, moins d'une semaine après le décès de l'Empereur à Sainte-Hélène. Le dernier acte d'Etat-civil qu'il signa est en date du 5 mai 1821. Il tint donc son rôle jusqu'au bout de ses moyens. Il eut pour successeur en juillet de la même année Pierre Michel Frèrejouan du Saint.

PS : le bulletin de décès de son fils Fidèle (en 1891) fait mention du père François, indiquant qu'il régna 26 ans comme maire de Guémené (ayant été par ailleurs Conseiller d'arrondissement) : c'est quand même un peu abuser...

(saga à suivre)