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lundi 6 avril 2015

La colonne du Père Joseph


On raconte que la construction de l'église de Guémené avait fini par lui monter à la sainte cafetière : Joseph Revert, le Père Joseph si l'on veut, avait tellement désiré son église, avait affronté tant de difficultés pour arriver à ses fins, que l'achèvement de cet incroyable édifice lui avait causé, dans son exaltation, une forme de transport au cerveau. 

Dire de lui qu'il avait le melon serait peu dire, car il avait au moins la pastèque : parler de montgolfière serait plus juste. 

Ne disait-il pas qu'il voulait être enterré dans l'oeuvre de sa vie ? N'avait-il pas déjà choisi l'emplacement ? N'avait-il pas déjà fait sculpter à ses propres frais la colonne au pied de laquelle sa dépouille mortelle devait venir reposer ?

Joseph Revert décéda en 1898, après vingt-deux années de sacerdoce à Guémené. Un an après sa mort, son successeur intercède auprès du Conseil municipal afin que le vœu du prélat soit accompli. Une résolution dudit Conseil est prise en ce sens, mais tout cela n'aboutit pas, la translation des restes mortels n'a pas lieu, et le vénérable reste logé dans son tombeau massif, près de la croix de granit qui orne le centre du cimetière.

Depuis, une inscription en latin, fixée à la fameuse colonne du Père Joseph, matérialise l'endroit où cet ensevelissement aurait se produire.

Je suis allé y faire un petit tour.

A hauteur d'yeux, la colonne est sculptée ou, en tout cas, offre dans des petites niches des statues de saints. Six statues par colonne. Celle chère à Joseph Revert est la première de la nef à droite en regardant le choeur, juste devant le monument aux morts. Elle est donc près de la chaire.

Puisqu'il en a financé l'ornementation, on peut penser qu'il en avait orienté les motifs et que les six personnages représentés revêtaient une importance personnelle pour ce mécène. 

On y trouve ainsi saint Joseph, son saint patron, sans grande surprise. Pour la sainte Vierge, rien à dire : tout le monde à l'époque s'y intéressait. Saint Stanislas Kotska est plus inattendu, mais peut-être est-ce un hommage aussi au collège du même nom de Nantes, fondé dans l'enfance du jeune Joseph et qu'il a pu fréquenter ?

La présence de saint Émilien, saint Louis ou saint Henri est un mystère que le brave curé a emporté dans sa tombe. En voici des photos :



























On remarque au passage que le chapiteau est également sculpté ainsi qu'une petite couronne située plus bas sur le haut pilier.















On peut se faire une idée de l'allure de l'intérieur de l'église peu de temps après le décès de son promoteur en examinant les vieilles cartes postales. En voici une dont la photographie doit dater de 1905 1910 :



Ce qui frappe d'abord, c'est l'absence de décoration sur la colonne de gauche : pas de saints représentés ni de chapiteau sculpté, contrairement à la colonne Revert à droite, en face. Les chapiteaux des piliers de la croisée de transept sont également ouvragés. Ce que confirme une approche plus détaillée de ce vieux cliché : 







On note que la chaire monumentale existait alors (sans doute présente depuis le début, 1886) et, sur la colonne qui lui fait face, qu'un grand Christ en croix était fixé (offert par le Comte du Halgouët pour la Mission de 1901).

Depuis, toutes les colonnes ont connu une décoration harmonisée : outre que leurs chapiteaux sont ouvragés, chacune héberge son lot de six saints, ainsi qu'on peut s'en aviser. Voici, pour finir cette excursion pascale, quelques photos prises hier matin alors que le soleil entrait par les grandes baies :










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