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samedi 21 novembre 2015

Famille rurale, je vous aime


Les attentats de vendredi dernier à Paris ont ceci de particulier pour les Parisiens, qu'ils peuvent avoir le sentiment que ç'aurait pu être eux, chacun, n'importe qui.

Les deux photos, ci-dessous, c'est l'immeuble en face de chez moi, de l'autre côté de l'étroite rue pavée. Un hommage de voisins, des fleurs, des bougies, des dessins d'enfants. La femme avait 46 ans et sa vie s'est arrêtée au Bataclan.





Mais, comme on dit, la réponse à cette terreur contre ce que nous sommes, doit être de continuer à être ce que l'on est.

Alors, on continue.


***

Le 17 juillet 1965, c'était un samedi, j'étais forcément à Guémené depuis quelques semaines déjà. Je ne me souviens pas d'avoir assisté à l'événement dont je vais parler et qui pourtant a dû faire envie à ma grand-mère Gustine et à ma tante Madeleine-qui-m'a-élevé : il serait bien étonnant que nous n'y ayons pas pointé notre nez...

Pourquoi cette date, cet événement ? Pour rien, sinon que le hasard de la recherche de vieux papiers concernant Guémené m'a amené à acheter un petit livret tout entier consacré à la Journée de la Famille Rurale, journée qui semble bien avoir eu toutes les caractéristiques d'une sorte de kermesse populaire.

Le livret en question comporte le programme des festivités et, pour le reste, des publicités locales. Outre un voyage au coeur des amusements passés, il s'agit donc d'une plongée dans le Guémené commerçant d'alors, décor de cette époque pour tous les Guémenois.

Cette fiesta familiale est placée sous le patronage de l'O.R.T.F., qui va assurer une partie de l'animation, et de divers organismes et associations du cru : communes circonvoisines, organismes agricoles financiers ou institutionnels, syndicats paysans,... La présence parmi ces "sponsors" du "Syndicat des Radio-Électriciens et Dérivés", est moins intuitive, mais enfin...et puis c'est quoi, les "Dérivés"..?



Le programme des festivités est rien moins qu'alléchant et couvre l'ensemble de la journée de ce beau samedi.

La Journée a probablement commencé par quelques discours de "présidents". Les politiques locaux président, en effet, à l'événement : Hunault (Xavier) de Chateaubriant à fait le déplacement ainsi que les maires de Plessé, Pierric, Marsac, Massérac, Conquereuil, Derval et Plessé. Celui de Guémené (commune non citée) doit bien être de la partie aussi. On remarque également Fournis, le notaire, Conseiller Général du canton de Guémené.

Une fois les parloteries officielles achevées, les choses sérieuses peuvent débuter. Le matin est à la main des autorités locales. Mais l'après-midi relève de l'organisation de l'O.R.T.F.

On commence donc à 9 heures 30 par des JEUX DIVERS pour enfants et grandes personnes. On imagine un peu : pêche au canard, course en sacs, ... pour les uns ; jeux d'adresse, concours de palets,...pour les autres. Imaginer aussi une buvette, voire plusieurs : l'exercice donne soif, c'est bien connu, surtout à Guémené.

On enchaîne par un RADIO-CROCHET. On ne conserve malheureusement pas de trace de cet épisode lyrique qui dut valoir son pesant de nougatine. L'imagination vagabonde, en essayant de se figurer la scène...Heureusement, le Cercle Celtique du Don vient offrir une demi-heure de folklore costumé vers 11 heures.

Le déroulement de l'après-midi est confié à un présentateur animateur "sympathique", Eric Menigant qui opère depuis un car studio de l'O.R.T.F. Il s'agit peut-être d'Eric Menigand, un comédien de cette époque.

A 13 heures est lancé le FIL ROUGE. Je ne sais pas ce que c'est, mais ça dure quand même deux heures.

A 15 heures, nous sommes au pic de la journée : on lance les "épreuves intéressant le machinisme agricole" (concours ou démonstration d'engins ?) puis la "sélection des familles". Tout ça nous entraîne jusque vers 18 heures.

Pendant ce temps, les fanfares du coin et le Cercle Celtique donnent de la voix et de la cuisse : "Aubades, chants et danses" se sont succédé à un rythme endiablé.

Enfin, il faut bien terminer une fête, et à 18 heures on procède à la remise des lots. Une tombola devait sans doute être associée à l'événement : les programme sont en effet numérotés et coûtent un franc. C'est la "Reine de Guémené" qui s'y colle...premier prix un vélo, deuxième prix dix bouteilles de Gros Plant, troisième prix... Applaudissements, bisous, un dernier coup de blanc pour la route, la foule se disperse...On regrette vraiment de ne se souvenir de rien...




La partie publicitaire du livret est aussi un régal.

Il faut d'abord apprécier les conseils en matière de prudence de conduite automobile du syndicat d'initiative de Guémené qui, pour l'occasion fait couplé gagnant avec la Prévention Routière. Ainsi ce proverbe marqué au coin du bon sens : "Va vite quand tu peux, doucement quand il faut, mais jamais trop vite"...Ou encore cette injonction qui en dit long sur les méthodes d'apprentissages "économiques" de la conduite à l'époque : "Apprenez à conduire avec des professionnels, votre vie n'a pas de prix"... Ou même cette remarque pleine d'un lourd sous-entendu à la fin : "Voiture ou cycliste mal ou non éclairé, engin ignoré"...

Commence ensuite la longue litanie des "réclames". Elles se distinguent par leur taille : page, demi-page, quart-de-page ; l'accumulation d'arguments factuels supposés convaincre ; la typo ; une accroche, quelque fois.

Legrand, place de l'Eglise vendait des disques, des lustres, des frigos, des télés,...et Sévère Babin, derrière la Mairie, s'occupait de tout en matière de photographie, en son "Studio Celtique".



L'Economique, sans doute parce qu'on y pratiquait de petits prix, n'avait apparemment pas les moyens de se payer plus qu'un quart-de-page. Sa clientèle est faite de "clientes". 

Le chauffagiste Henri Janvier, sur la route de Beslé, s'occupe de pas mal de choses : plomberie, zinguerie, etc...Il vend aussi des bouteilles de gaz.



Si Grimault résume assez bien son activité par un "Tout l'Habillement" aussi simple qu'exhaustif, Marie Rousseau semble avoir un territoire de jeu moins homogène : on ne sait pas bien pourquoi, en effet, son magasin de la Place de l'Eglise étant consacré à l'alimentation, elle y vend aussi les laines Phildar...Bibard, l'horloger situé non loin, n'hésite pas à mettre en avant son activité de maroquinerie...



Avec l'auto-école St-Christophe de la rue de la Chevauchardais, c'est toute la modernité des années 60 qui s'étale : on utilise des "disques et enregistrements magnétiques", oui madame, pour des cours de code de surcroît gratuits et, tant qu'à faire, modernes !

Aux Docks de l'Ouest de la famille Daniel (ah, Julien Daniel, vous êtes toujours dans le panthéon de mes souvenirs, quand vous faisiez votre tournée avec votre camionnette, distribuant des bonbons aux enfants), la modernité est bien présente aussi : c'est un "Libre Service" !

Et Ménard, combien de cadeaux et autres bricoles achetés avec ma grand-mère dans ce magasin de référence !



Le Central' Café de la Place Simon existe toujours, avec sa terrasse. On n'y sert surement plus des bières "La Meuse". On appréciera la mention "consommations fraîches"... 

On allait chez Gravaud, rue de l’Épée pour acheter des canevas ou des écheveaux de fil DMC pour les broderies de ma tante Madeleine.



On ne manquait jamais de s'arrêter au Café du Stade, rue de Beslé : c'était souvent au retour des enterrements sur le trajet desquels était ce vénérable établissement. Je ne me rappelle pas avoir jamais rencontré André Paillaud, mais sa femme fait partie de mes souvenirs d'enfance. Son prénom était-il Monique ? Je finis par en douter. 

Ma grand-mère était amie avec cette très gentille dame. Je la revois derrière son comptoir, son rire sonore emplit encore mes oreilles et si la grenadine - qu'elle m'offrait - a un visage, c'est le sien.



Nous n'avons jamais fréquenté le magasin de Josette Haudion, "Elegance et Haute Coiffure". On se demande bien quel diplôme d'Etat pouvait bien avoir cette personne pour vendre ses produits. Au fait qu'est-ce que ces "exclusivités" : Dr Faust et R Garraud ?



Le Café de la Résistance n'est plus. Nous n'y allions jamais. Mais l'un des fils Le Huludut, enseignant, m'avait donné des leçons, l'été, à la fin des année 60. 

Hurel est plus associé pour moi aux travaux de menuiserie qu'au reste. Je garde assez vivace son souvenir (une casquette, une cigarette au coin de la bouche) et sauf si je confonds, il me semble qu'il avait un atelier aussi sur le Boulevard.



Borgogno, je m'en souviens, et de sa fin et de son enterrement...J'en ai parlé naguère...

Jehanno, l'auto-école, fait encore plus fort que St-Christophe : les cours de codes gratuits sont filmés !



Gadessaud, rue de la Poste, constitue une adresse familière pour cette époque où tout le monde avait un vélo (à réparer). C'est aujourd'hui une épicerie fine qui a repris l'emplacement, plus rien à voir...

On reste par ailleurs confondu par l'éclectisme marchand de Lepage, épicerie et mercerie, miel et tissus...

Et ce pauvre Chopin, "membre du Comité Artistique de la Coiffure Française", comment a-t-il pu atterrir chez "Mme Borgogno" ? Encore heureux qu'il pratique les "coiffures modernes" !



Briand, à l'angle de la rue de la Poste et de la rue de la Chevauchardais, était vraiment "tout l'ameublement", à Guémené.

Et Clavier ! C'est là que j'allais acheter mes asticots pour la pêche et les carottes de tabac à chiquer pour le Père Després, notre voisin de la Hyonnais...



Les frères Cormerais furent une référence pour la réparation automobile. C'est chez eux que mes parents confièrent à l'été 67 leur pauvre R10 toute neuve ravagée dans un accident vers Langon. Et la charcuterie Poupon de la Place Simon (qui visiblement n'avait qu'un pâté de lapin, mais plusieurs andouilles de Guémené...), demeure dans ma mémoire olfactive...



Pierre Legendre du Pont de l'Arondelle (ou de la Rondelle, au fait ?) était un cousin germain de ma mère. Sa belle-fille habite toujours sur place, je la salue.

Et chez Colson, tout est bon ! C'est fort !



Il faudrait des pages pour évoquer les pâtisseries de chez Tardif !

On notera sur un autre plan et avec curiosité que Janine Geffray vous proposait un examen du cheveu (gratuit) avec "micro-visionneur" : qu'en faisait-elle ?




Sans doute y aurait-il beaucoup plus à dire, mais je n'allais pas beaucoup faire les courses, en dehors des choses les plus courantes.

Je note d'ailleurs à regret que le magasin de fruits et légumes de Madame Michel, décédée très âgée, récemment, ne figure pas dans la liste des annonceurs. Mais après tout, elle n'en avait pas besoin tant son magasin et ses produits étaient fameux.

3 commentaires:

  1. Ce n'est pas UNE petite madeleine que vous vous offrez, mais toute une boite ! J'aime beaucoup cette revue des commerçants et artisans du bourg qui devait être bien animé à cette époque. Quelle belle occasion ce programme.

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  3. En effet, le bourg était animé. Il va sans dire qu'il n'y avait pas de Super U...

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