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dimanche 7 juillet 2013

Les trois Cloches de Beslé


J'adore les bénédictions de cloches. On trouve la trace d'une telle cérémonie à Guémené à la fin du XVIIème siècle, et je connais le récit d'une autre qui s'est tenue avant-guerre dans le fief municipal de l'ancien député et conseiller général du coin, ma tête de turc Emmerand Bardoul (alias "je suis Bardoul"), maire pendant 43 ans de Marsac-sur-Don.

Mais ces deux sujets que je traîne dans ma tête depuis un bout de temps, appellent un peu de travail et donc de temps, que je n'arrive pas à trouver en ce moment. Aussi, je ne boude pas mon plaisir de vous parler plus succinctement de la bénédiction qui se tint le dimanche 1er mai 1938, à Beslé, et qui concernait trois nouvelles cloches.

Ce fut apparemment une grande fête qui se déroula en début d'après-midi, sous le haut patronage de l'évêque de Nantes, Monseigneur Villepelet. On n'en sait guère sur l'aspect religieux de la chose. On ne peut qu'imaginer la foule des paroissiens réunis autour de leur curé, les prières, les chants...l'encens, peut-être...

Une fois bénies les trois cloches, l'évêque en profita pour accrocher à la poitrine de deux gloires avérées de la paroisse, deux piliers antiques de l'animation religieuse locale, une belle breloque.

Les heureux récipiendaires, "deux vieux serviteurs de la paroisse", furent Alexandre Houllier, chantre depuis plus de 60 ans, et Ernest Perceveau, organiste depuis plus de 50 ans.

Mais commençons par fixer le cadre.

L'église de Beslé a été reconstruite en 1843 : elle est dédiée à Saint-Pierre et Saint-Paul, qui sont d'ailleurs représentés sur les deux vitraux situés dans le choeur, de part et d'autre de l'autel principal (il faudra d'ailleurs que je développe cette question des vitraux ultérieurement).

L'église dispose d'un clocher-porche (dans lequel résident nos cloches ondoyées il y a désormais 75 ans) dont la flèche à été surélevée à la fin du XIXème siècle.

L' évêque de Nantes, Mgr Villepelet est un jeunot : né en 1892 dans le Cher, il a donc 46 ans au moment des faits. Il a été porté au siège épiscopal depuis peu, c'est-à-dire depuis août 1936. Il va rester 30 ans à son poste avant de se retirer, après le Concile Vatican II, dans son village natal (il meurt fort âgé, en 1982).



Evidemment, être évêque à Nantes pendant la guerre, c'est bien délicat...Ni un salaud, ni un héros, comme on dit.

S'agissant de Vichy et de Pétain, il souligne bien à plusieurs reprises « les efforts généreux faits par le chef de l’Etat pour rebâtir la France »... Il s’opposera toutefois (comme tous ses collègues évêques) au concept de « jeunesse unique », idée du régime de Vichy combattue par l'Eglise de fédérer, sous sa houlette, tous les mouvements de jeunesse (l'Eglise craignait d'être dépossédée de son influence sur les jeunes).

L'évêque se refusera à collaborer avec l’occupant et aurait eu, selon une notice bibliographique trouvée sur le Net, une attitude "courageuse" durant les épreuves qui touchèrent la région de Nantes (otages fusillés, bombardements). 

Pour rester sur les conflits,  il garda le silence durant la guerre d’Algérie, se bornant à reprendre les déclarations de l’Assemblée des Cardinaux et Archevêques, sans plus de commentaires.

Bref, les grandes compassions sont muettes...

Nos amis Alexandre et Ernest firent la paire à l'église de Beslé pendant des lustres. C'étaient des citoyens vraiment ancrés dans cette bourgade.

Le chantre, né le 11 octobre 1860 au bourg de Beslé, était le fils de René Houllier, un laboureur.

Veuf, il vécut avec sa fille Marie, née en 1891 de son mariage avec Anne Marchand, cultivatrice. En dehors du chant des offices religieux, il s'employait comme menuisier. Il décéda le 10 décembre 1950 âgé de plus de 90 ans.

Son compère l'organiste était son cadet de quelques années. Né le 12 octobre 1867 au bourg de Beslé, Ernest Perceveau était le fils d'un menuisier et d'une cultivatrice. Il se maria en 1899 avec une dame Marguerite Chauvin. De son métier, Ernest était négociant (épicerie et tissus).

On se demande bien quelle médaille l'évêque put bien remettre aux deux vieux amis Ernest et Alexandre.

Il existait bien à l'époque une "Médaille d'honneur des Sociétés musicales et chorales", créée en 1924 et abolie depuis, dont l'objet était la récompense des musiciens et chanteurs ayant trente ans de société musicale. Mais nos amis n'ont point à proprement parler appartenu à ce genre de sociétés, me semble-t-il.

Il paraît plus probable, par conséquent, que la médaille ait été celle créée en septembre 1937 par notre évêque Villepelet : la Médaille du Diocèse, encore appelée Médaille de Saint-Clair, un hochet qui fait délicatement référence à la bretonnitude du Diocèce.



Peut-être quelque descendant de nos héros pourra-t-il nous éclairer ?

Je termine en vous saluant et par un aveu : mon esprit parfois facétieux m'a longtemps amené à caresser l'idée que les trois "cloches" de cette histoire n'étaient pas celles qu'on croyait, et j'ai failli broder tout mon "post" du jour sur ce thème là. Vous avez bien entendu toute latitude de vous faire une opinion personnelle sur l'opportunité de cette interprétation des choses...

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