Jadis, l'entrée par le sud de Guémené s'effectuait par deux ponts de pierre passant le Don. Du premier, devenu impraticable vers 1860, ne restent que les piles sur lesquels repose la passerelle actuelle datant de 1892. Le second pont est la vieille arche de plein cintre appelée Arche de Condé, famille dont dépendait jadis Guémené et à qui des droits étaient versés sur les céréales, les boissons et le bétail qui circulaient par là.
Cette vieille route passait ainsi au pied du Grand-Moulin, longeait le lavoir puis le Grand-Logis et rejoignait la rue Garde-Dieu.
C'est en 1922, par une décision municipale du 5 mars, que Gilles Durand, maire de l'époque, fit, paraît-il, adopter les noms des principales rues.
Il s'agissait des rues de Redon, de l'Hôtel de Ville, de Chateaubriand, des Ponts, du Lavoir, Garde-Dieu, Saint-Clément, de Mirettes, de l'Epée, des Porteaux et de la Chevauchardais. A cela s'ajoutait notre fameuse Place Simon.
Certains noms sont descriptifs et n'appellent pas de commentaire. Mais d'autres sont moins évidents : voici les explications qu'on en peut trouver dans les Annales de Nantes et du Pays Nantais, numéro 140 du premier trimestre 1966. Certaines paraissent tirées par les cheveux, mais enfin...
La rue Garde-Dieu tire son appellation de la présence d'une ancienne maison hospitalière importante, liée au Grand-Logis, où les pélerins, puis les malades pauvres étaient reçus et soignés.
C'est également dans cette rue, près de cet hôpital antique, que ce tient la maison du four à ban (évoquée dans un post précédent à la faveur d'un crime survenu au XVIIème siècle), où, selon l'usage de l'époque féodale, les populations devaient absolument faire cuire leur pain moyennant une redevance au profit de la famille seigneuriale de Bruc, propriétaire du four. Cette famille qui avait droit de justice, tenait également au bourg de Guémené un auditoire (salle de justice) et une prison (près du Grand-Logis).
La rue de l'Epée tirerait son nom, à l'instar de ce qui s'observe dans les lieux marqués par la présence de nombreux gentilshommes, d'une salle d'escrime où ils se seraient réunis. Faut croire que les instruments d'embrochage étaient rares puisque qu'il n'est question que d'une épée...
La rue des Porteaux et celle de la Chevauchardais évoquent des villages qui se sont fait absorbés par le bourg.
Cette dernière étaient autrefois l'amorce de la route de Beslé. Il existait semble-t-il à la Chevauchardais une auberge-relais où les cavaliers pouvaient louer un cheval de selle (permettant bien entendu une chevauchée rapide : de là à y voir un rapport...).
La rue de la Poste fut jadis nommée la ruelle de Bidaudais : la prairie de la Bidaudais servait alors de champ de foire et c'est sur cet emplacement que fut construite l'église actuelle à qui il fallait bien cet espace...
La rue de Mirettes abritait soi-disant les magasins pour les élégantes du bourg et des châteaux environnants. Il paraît qu'elles devaient écarquiller les "mirettes" pour apprécier la marchandise, en cette ruelle étroite et sombre (si, si !).
La place Simon doit son nom, comme on sait, à la dynastie de maires (6 !) et de députés (3 !) qui a marqué l'histoire politique moderne de la cité.
L'article dont je m'inspire très largement est signé des initiales d'Alfred Gernoux, à cette époque président de la Société Académique de Nantes et de Loire-Atlantique dont les Annales étaient l’organe.
Alfred Gernoux était né à Noyal-sur-Brutz en 1892 et mourut à Nantes en 1973. C'était un instituteur qui devint ce qu'on appelle un "érudit". Auteur prolifique, il se passionna pour l'histoire locale et se fit son propre éditeur avant la seconde guerre mondiale. Voici des éléments de sa bibliographie :
La Belle Madame de Senonnes (1931) ; La Sylne castelbriantaise (1934) ; Carrier-le Maudit (1935) ; La Révolution au pays de Châteaubriand (1936) ; Le Maquis de Saffré (1946) ; Châteaubriand et ses martyrs (1946), et d'autres titres antérieurs qu'il auto édita : la Mère de Victor Hugo, le Serment d’un Breton, la Chouannerie de 1832, les Pionniers de l’enseignement public dans l’arrondissement de Châteaubriant.
Je joins à ce post des photos du bas Guémené, prises lors d'une promenade qui m'a conduit de la Place Simon à la Passerelle, en passant devant le Grand-Logis, le Grand-Moulin et le Lavoir, il y a quelques semaines de cela. On y voit notamment, au vieux Lavoir pavé de pierres bleues, les fourneaux où devait bouillir le linge. Le spectre de ma Grand-mère Gustine hante ces lieux délaissés non loin desquels elle dut naître, et je l'imagine à genou dans sa boite-sabot de bois, vêtue de noir, battre les draps d'un mouvement vigoureux...
Souvenirs... J'y retourne régulièrement
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