Voici donc un nouveau conte en patois que j'extrais du recueil de l'Abbé Chenet. J'ai décidé de modifier un peu l'orthographe de l'original, pour mieux coller à la prononciation que j'ai dans l'oreille et dans le souvenir du patois de ma grand-mère.
L'histoire est simple : au catéchisme, qui se tient dans une chapelle où sont des statues de Saints, le vicaire demande le nom de l'un d'entre eux, dont la représentation est abîmée et dont le tronc est toujours vide.
D'abord dédiée à Saint-Julien de Guémené, cette chapelle avait été fondée au moyen-âge par les seigneurs de Montnoël pour leur servir d'enfeu (lieu de sépulture).
Reconstruite en 1709, elle était rectangulaire, son chevet polygonal et sa voûte était peinte. On y faisait jadis des baptêmes, des mariages et des enterrements.
Une ancienne dalle tumulaire (pierre tombale) datée du XVème siècle et provenant de cette chapelle se trouve rue du Grand Moulin : elle est en granit et le gisant est gravé en creux, les mains jointes. Autour de la pierre une épitaphe en lettres gothiques presque illisibles, il s'agit vraisemblablement d'un seigneur de Montnoël du XIVème siècle.
Cette chapelle, servit de mairie pendant la Révolution.
Voici donc ce morceau sympathique :
Tout à couteu d’la piac’Simon
Où t’eut d’aoutfail’ la
veuille église
A la dreut’ de la rue des
Ponts
Enteur le jardrin et la r’mise
Se trouveut la Chapell’
Saint-Jean
Où l’on faiseut le catéchisse
Aux gars et aux fill’ de dix
ans
Qu’éteuent pas terjous sans
malice
Comm’ vous l’vereuz dans
cette histouère
Que j’ai oui dir’ à Jean
Martin
Qu’en aura fait du
Purgatouère
Pour manqu’ de respect à un
Saint.
- Y’avait donc dans la p’tite
chapelle
Cinq ou six veuill’ statues
en bois :
Saint Jean, Saint Paul, si je
m’rappelle
Et vantié ben cor deux ou
trois.
Les noms t’euent marqués par
en d’sous
Et dans un tronc à grouss’
fenures
Chacun veneut apporteu des
sous
Pour obtenir des guérissures.
Mais dam’, y aveut un Saint
ben vieux
Qui n’aveut pu guère de
peinture,
Le nez casseu et ren qu’un z’yeux.
Y faiseut ben triste figure
On n’aveut jamais su son nom,
Personn’ metteut ren dans sa
boite
Allez li porteu ? A quoi
bon,
Ça n’s’reut point un’ prière
adroite :
On seut-y s’ment d’où y t’eut
v’nu
Faut terjous s’méfieu, par
prudence
Des gens qui vous sont
inconnus
Et qui n’ont point de r’connaissance.
- Un jour donc le vicaire du
temps
Dit aux gars de son
catéchisse :
" Les gars, j’donn’ un
bon point su’l champ
Au sien d’vous qu’aura l’pu d’malice
Et répondra à ma question :
Du vieux Saint qu’vous voyeuz
là-bas
Voyons les gars qui m’dira le
nom.
- Moi, dit Milet. - Hé ben
mon gars
Chom’te ben vit’ et n’ai pas
pou.
- J’se chomeu. - Allons et
ben… ?
Et ben, puisqu’y n’a jamais d’sous
Je creu que c’est Saint
Gobe-Rien…"
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