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samedi 16 février 2013

Julien Pinczon, l'éphé-maire

La vie politique de Guémené respire au rythme des soubresauts nationaux, et des drames à la mesure de ces derniers viennent parfois bouleverser la vie paisible de notre chef-lieu de canton.

Nous sommes en 1870, l'Empire vit ses derniers feux : le 19 juillet, Napoléon III entame la guerre avec l'Allemagne. Ce conflit ne sera très vite qu'une suite de débâcles militaires françaises et s'achèvera dans la déroute fin janvier 1871. La Commune de Paris sera proclamée le 18 mars de cette même année et sera réprimée sauvagement par les Versaillais de Thiers au mois de mai suivant. Entre temps, le 4 septembre 1870, la République est proclamée.

On voit donc qu'entre l'été 1870 et le printemps 1871, la système politique français change du tout au tout. Et à Guémené ?

Pareil ou quasiment, serait-on tenté de dire. Qu'on en juge.

Le 6 et 7 août ont eu lieu dans tout le pays des élections municipales qui ont amené à Guémené 23 Conseillers et la nomination d'un maire, l'inoxydable Fidèle Simon.

Ce Conseil comprend les personnalités guémenoises suivantes :

MM. Simon Fidèle, Durand Gilles (Père), David René, Clavier François, Amossé Guillaume, Bernard Denis, Bernard Pierre, Desvaux François (Père), Fournel Julien, Desvaux François (de Castres), Perrigot Julien, David Jean, Saillant Alphonse, Tessier Mathurin, Houllier françois, Pinczon Julien, Etienne Joseph, Jalet, Jospeh, Gicou Jean Baptiste, Tessier Sébastien, Alliot Pierre, Bréger Pierre Marie et Amossé René.

Le 28 août, alors que la situation militaire est déjà très compromise sur les Marches de l'Est, le Conseil municipal se réunit pour procéder à l'installation des Conseillers. Les membres du Conseil prêtent ainsi serment à l'Empereur et déclarent chacun : "Je jure obéissance à la Constitution et fidélité à l'Empereur." Les imprudents, serait-on tenté de penser...

Puis, sur injonction du sous-préfet, le nouveau Conseil s'occupe de nommer les douze membres d'une commission de recensement de la Garde Nationale, dans laquelle figurent notamment Julien Pinczon, huissier de son état.

Le 10 septembre, la République étant proclamée depuis 6 jours, Fidèle Simon signe un arrêté fixant le prix des différents pains (pain blanc, pain "batelier", pain de méteil), encore estampillé du sceau à l'Aigle couronné. Le 21 septembre, Fidèle Simon signe son dernier acte de naissance avant d'être remplacé fugacement à cette tâche par Gilles Durand puis, à partir de fin septembre, par Julien Pinczon.

La dynastie Simon est renversée.

Le 3 janvier 1871, Julien Pinczon, "maire provisoire", prend un arrêté pour fixer à nouveau le prix des pains... Visiblement l'administration républicaine n'a pas eu le temps de changer les cachets : le tampon à l'Aigle couronné sanctionne encore la décision municipale. Apparemment les prix baissent : vive la République !

Le Conseil municipal ne se réunit pas avant le 10 mai 1871, c'est-à-dire après les nouvelles élections survenues le 30 avril 1871.

Ce Conseil du 10 mai 1871 est bien entendu consacré à l'installation des 23 membres du tout "nouveau" Conseil.

Par rapport à l'équipe sortante d'août 1870,...19 Conseillers sur 23 sont reconduits ! Le changement, certes, mais dans la continuité tout de même.

D'ailleurs, Fidèle Simon redevient maire.

Les quatre Conseillers non réélus sont Alphonse Saillant, Guillaume Amossé, Joseph Jalet et...Julien Pinczon (ils sont remplacés par François Lucas, Auguste Houllier, Guillaume Gascoin et Pierre Marie Plédel).

Aussitôt, Fidèle Simon prend un nouvel arrêté...modifiant les prix du pain !

Mais il faut revenir à cette séance dramatique du Conseil municipal du 10 mai 1871. Les élections sont une terrible déconvenue pour Julien Pinczon qui doit néanmoins, en tant que "maire provisoire" convoquer et assister à l'ouverture de cette première séance de la "nouvelle" équipe municipale.

Visiblement, il est présent pendant le vote qui voit l'élection de Fidèle Simon au poste de Premier Magistrat de Guémené, celle de Gilles Durand et de René David aux deux postes d'adjoints.

Le compte rendu de séance indique que Julien Pinczon "s'est retiré sans signer et sans attendre la lecture" du procès verbal d'élection du Maire.

Pourquoi tant de vexation ? Pourquoi tant d'ingratitude ?

Car Julien Pinczon, "maire provisoire" de Guémené entre septembre 1870 et mai 1871, n'a pas à son actif qu'un modeste et passager arrêté sur les prix des pains : non, il a, par ailleurs, enregistré 122 naissances, célébré 4 mariages et recueilli 104 décès.

Un bilan qui allie à l'évidence la quantité à la qualité et qui méritait bien ce tardif hommage.

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