Rechercher dans ce blog

dimanche 30 juin 2013

Coiffes de Guémené


Le journal La Croix n'a pas toujours eu les idées libérales qui, de nos jours, le caractérise et l’honore.

Anti-républicain, ce journal catholique se proclamait en pleine affaire Dreyfus à la fin du XIXème siècle, comme étant le "plus anti-juif de France".

C'est évidemment avec intérêt que l'on se penche sur les articles anciens publiés dans ce périodique et qui concernent plus particulièrement Guémené-Penfao et ses environs.

Mais aussi avec étonnement, parfois, en raison des sujets évoqués.

Ainsi à la Une du numéro 12744 du 28 septembre 1924, La Croix traite du régionalisme en Loire-Inférieure, au détour d'un sujet de fond, cela ne vous l’échappera pas.

En un premier paragraphe concis et sans appel, le journal pose un problème qui devrait, en fait, peu concerner l'Eglise : à savoir, la perte de charme des jeunes filles qui délaissent la "coiffe gracieuse" régionale au profit du fade, frivole et national chapeau. Encore heureux, au reste, qu'elles veuillent bien en porter un, par ces temps de dissolutions des mœurs.

[Ce goût pour les attirails féminins supérieurs, étrange a priori de la part de pudibonds cléricaux, est assez naturel, toutefois quand on y songe, venant de la Calotte et du parti des mitrés...]

Mais heureusement (ou Dieu merci), il y a Guémené-Penfao. Guémené-Penfao et ses 6 000 habitants qui ne s'en laissent pas compter et amorcent sans mollir une contre-guérilla anti-chapeau.

On ne sait pas bien quelles sont les sourdes forces en présence qui, comme le décrit le journaliste catholique, conduisent "le mouvement de retour à la coiffe". On ne sait pas non plus, hélas, quels sont ces observateurs attentifs qui, surveillant sans relâche, chaque jour, la remontée de la coiffe sur le sommet des crânes graciles des guémenoises, alimentent en dépêches victorieuses la rédaction de La Croix qui suit, n'en doutons pas, haletante et pâmée, la déroute progressive du chapeau à Guémené.

Toujours est-il, note le journal, "qu'un certains nombre de jeunes filles qui étaient allées au chapeau reviennent à la jolie et coquette petite coiffe locale".

Mais entre nous, de quoi s'agit-il vraiment ? Je dispose de quelques cartes postales anciennes qui figurent des femmes et des jeunes filles en coiffe de Guémené-Penfao. Et puis il y a mon arrière-grand-mère Guenet, à la fin, suivie d'une jeune femme en coiffe de Plessé (appréciez la différence à 15 km de distance...).

Coiffe de Guémené

Coiffe de Beslé

Devant la pharmacie de la Place de l'Eglise

Femmes au lavoir du Grand-Moulin
Femmes au Moulin des Claies
Femmes de la Vallée
Devant la Pharmacie de la Place de l'Eglise
Femmes au passage du Thenou















Mon arrière-grand-mère Jeanne Marie Guenet, épouse Legendre














Coiffe de Plessé

















La Croix décèlent d'ailleurs un autre indice imparable de ce mouvement de retour des filles de Guémené à la tradition vestimentaire. La Municipalité ne vient-elle pas, "pour répondre aux voeux des régionalistes", de faire ériger un monument aux Morts dans le cimetière ("en magnifique granit breton") qui exalte le costume de pays (coiffe, fichu, tablier) ?

On a beaucoup évoqué ce monument sur le blog : voici à nouveau quelques photos :




Ainsi, sans le savoir et sans le vouloir (?), le sculpteur Nicot aurait-il d'abord érigé un très beau monument à la gloire de la guémenoise d'antan, au-delà même de la commémoration du sacrifice des enfants du pays et des souffrances de leurs proches ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire