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lundi 1 avril 2013

Tout Revert a sa médaille. En principe...


Il est une curiosité (parmi tant d'autres) dans l'église de Guémené sur laquelle je m'interroge depuis un moment.

Il s'agit d'une plaque noire fixée à une colonne de la nef, non loin de la chaire, où l'on a inscrit en lettre d'or un petit texte latin :



Sauf erreur de ma part, et surtout de celle du traducteur Google, cela signifie que cette plaque symbolise la tombe de J. Revert 1830 ~ 1898.

Je ne dois pas beaucoup m'égarer en affirmant que plus grand monde à Guémené ni ailleurs ne saurait dire qui fut ce personnage. J'ai bien consulté l'annuaire des rues et voies de Guémené, et aucune ne lui est dédiée.

Pourtant, J. Revert eu son heure de gloire dans notre commune à la fin du XIXème siècle, que plus rien donc ne vient rappeler. A moins que, comme on va le voir, ce ne soit le contraire, finalement.

J. Revert est né au bourg de Derval le 12 janvier 1830, d'un père sabotier qui le prénomme Joseph Jean Marie.

Je ne sais rien de lui, jusqu'à présent, de plus que le fait qu'il fut curé de Guémené de 1876 à sa mort qui survint en juin 1898. Que fit-il avant ? Aucune trompette d'aucune renommée ne paraît vouloir le proclamer.

Avant la séparation de l'Eglise et de l'Etat, en 1905, la vie paroissiale, notamment sous son aspect matériel et économique, était administrée par ce qu'on appelait le "conseil de fabrique" dont la municipalité examinait régulièrement les affaires et les comptes. C'est ainsi que les délibérations municipales portent quelques témoignages de la vie de cette "fabrique".

 Juste avant 1900, à Guémené, ce conseil de fabrique était présidé par le Comte du Halgouët. A ses côtés siégeaient les autres membres du conseil : MM. de Boisfleury (propriétaire), Denis Bernard, Vignard (pharmacien : ma mère travailla pour sa famille à Nantes, plus tard), Chapron (notaire) ainsi que le curé du moment, Alexandre Arbeille.

Un an après le décès de Joseph Revert, le 23 juin 1899, le conseil de fabrique se fend d'une résolution à l'adresse du maire de l'époque, l'indéboulonnable Fidèle de l'inoxydable famille des Simon.

Ce dernier en donne lecture à la séance du Conseil municipal du 20 août suivant. En voici la transcription (c'est le curé qui parle) : 

"Messieurs, 

La reconnaissance pour 22 années de dévouement soutenu et d'épreuves diverses nous fait un devoir d'honorer la mémoire de mon vénéré prédécesseur, Monsieur l'abbé Joseph Revert, à l'occasion du premier anniversaire de sa mort.

Je viens donc vous prier de solliciter près de l'autorité compétente l'autorisation de transférer les restes mortels de M. Revert du cimetière dans l'église qu'il a réussi à construire malgré les difficultés suscitées par le temps et par les hommes."

On y apprend ainsi que l'abbé Revert a "construit" l'église monumentale qui domine toujours notre commune (elle date en effet de 1886) et que cela s'est fait dans la peine et la douleur (d'aucuns lui ont apparemment mis des bâtons dans la soutane). Face à cet exploit, ses amis ne trouvent pas que la tombe qui est la sienne dans le cimetière soit à la mesure de son mérite : l'église de Guémené serait plus appropriée...En comparant les deux monuments, on est forcément frappé par la différence de taille...

Mais visiblement, s'était un peu aussi l'avis du vénérable lui-même, du moins si l'on en croit la suite du texte. Le curé Arbeille poursuit en effet :

"C'était d'ailleurs le vif désir du vénérable défunt qui avait prévu un emplacement pour cela et avait fait sculpter de ses deniers la colonne l'avoisinant."

Vanitas vanitatum et omnia vanitas...!, comme dit l’Ecclésiaste.  Sur ses vieux jours, son oeuvre de bâtisseur lui était un peu montée à la sainte cafetière, au Père Joseph....

Enfin, tout s'explique : malgré l'avis favorable du conseil municipal, il est peu probable que les "restes mortels" du feu curé de Guémené aient quitté leur "dernière demeure" pour rejoindre le pied de la colonne ouvragée à ses frais. D'où la plaque apposée sur ladite colonne.

Le curé Joseph Revert, le fils de l'ancien sabotier de Derval, n'a pas eu, en quelque sorte, sépulture à son pied.

Sur sa tombe, au cimetière de Guémené, tombe qui s'abîme et dont je publie ci-après des photos, il est écrit qu'il fut le curé d'une bourgade qui lui doit son église, ce dont ses paroissiens lui sont reconnaissants.

N'est-ce pas là la plus belle médaille que méritait ce Revert ?





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