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dimanche 21 octobre 2012

Prosper, youp' la boum !


Peut-être ne connaissez-vous pas Prosper de Boisfleury. 

Moi non plus, en fait. Et il ne serait resté à jamais qu'un voisin de cimetière (une vieille tombe avec une grande pierre de schiste bleu par dessus, où s'efface gentiment le souvenir gravé de Prosper) sans J. H., aimable guémenoise et lectrice du blog qui a attiré mon attention, cet été, sur les exploits de ce brave homme. Je la salue chaleureusement, au passage.

Car Prosper (Pierre-Prosper), véritable Janus, avait deux visages ou plutôt deux casquettes : d'un côté, un paisible notable chargé d'administrer une justice de proximité en toute bénignité ; de l'autre, un terrible chasseur, le Nemrod des bords du Don.

Qu'on en juge, si j'ose dire.

Prosper est né en 1801 au château de Boisfleury où il est mort, d'ailleurs, en févier 1869. Marié, il a deux enfants, dont Arthur qui vivra quasi centenaire et que ma mère a connu dans son enfance (il lui parlait de l'Action Française...). 

Juge de Paix du canton de Guémené, il avait à ce titre pour principale mission de régler les litiges de la vie quotidienne. L'accès à la fonction ne nécessitait aucune qualification particulière en droit (c'est commode) : on y retrouvait (paraît-il) des personnes dotées d'une autorité morale et d'une situation sociale établies (bon point pour Prosper). Cette justice, issue de la Révolution, vient remplacer la justice seigneuriale abolie (rien ne se perd, tout se transforme).

Sans doute ce "travail" lui laissait-il un peu de temps libre. Car le nom de Prosper est passé à la postérité (relative) en raison de ses exploits de chasseur de loups.

A l'extrême fin du 18ème siècle, on recensait encore 167 loups dans notre Loire-Inférieure (28 loups, 28 louves, 111 louveteaux, précision qui laisse rêveur...), ce qui semble énorme par rapport aux chiffres beaucoup plus faibles des départements limitrophes.

On ne peut pas dire que c'est la faute à Prosper : en effet, non content d'éradiquer les litiges de voisinage, il aurait tué dans la seule année 1838, à lui seul, 39 de ces animaux qui hantèrent l'imaginaire de nos ancêtres. Diantre !

Mais le plus beau reste à venir.

Un beau jour d'hiver, Prosper part dans la lande chevaucher avec sa meute et son fusil. Ses chiens débusquent un de ces animaux de légende. La chasse commence. Dix heures durant Prosper fend les fourrés d'ajoncs et d'épines acérées. Enfin, le loup est acculé. Il fait face. Prosper l'ajuste avec son fusil. Mais le coup ne part pas. Le nouveau Nemrod se débarrasse de son arme. Mais il a perdu son poignard. N'écoutant que son courage, il se jette sur la bête. S'ensuit un corps à corps furieux. Le chasseur prend l'animal à la gorge, l'étouffe, il lui martèle le poitrail de son genoux, les haleines fumantes de l'homme et de la bête se mélangent. Enfin la bête succombe. Prosper en sang et en haillons se relève vainqueur.

On voit bien le retour au château de Boisfleury et les tartarinades qui s'ensuivirent.

Un livre, "Les Cavaliers du Gâvre" paru en 1992, narre cette anecdote et d'autres encore. 

A signaler qu'il existe également un autre ouvrage qui met en scène les exploits cynégétiques d'un Boisfleury : "De meute à mort : Carnets de chasse d'un veneur, Henry de Boisfleury, 1840-1908". Espérons qu'il n'ait pas tué un éléphant avec ses seules dents...

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