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dimanche 24 mars 2013

Le destin tragique de Pauline Forestier, MPLF


"Une Bretonne de Guémené Penfao assassinée par les Boches."

L'action se passe à Wiesbaden, en territoire allemand, en mars 1920, pendant l'occupation de la rive droite du Rhin par les troupes françaises. L'Allemagne est vaincue, envahie par les Alliés, agitée de troubles sociaux, économiques et politiques, humiliée.

L'armée d'occupation française compte 100.000 soldats (dont beaucoup de troupes coloniales, ce qui ulcère les Allemands) et des auxiliaires civils.

Pauline Forestier a dix-huit ans. Elle fait partie de ces auxiliaires.

Elle est née à Avessac mais a été élevée à Guémené-Penfao, chez son beau-frère Alexandre Menuet, garde-chasse chez les Simon.

Elle a acquis une formation de dactylographe et travaille à Nantes, dans une usine sidérurgique, les Forges de Nantes. Sur proposition du colonel-commandant de cet établissement d'Etat, elle part donc rejoindre les troupes françaises en Allemagne.

Ce devait être un voyage bien extraordinaire à l'époque que de parcourir (en train forcément) les 1.200 kilomètres qui doivent séparer Guémené de Wiesbaden, près de Mayence. Que de changements ! Y compris à Paris ! Autre chose que d'aller à Nantes...

Ce devait être aussi un bien curieux sentiment qui animait la jeune fille partant "occuper" le pays dont des soldats, quelques années plus tôt, avaient tué son grand frère Baptiste. 

Comment, en effet, ne pas y penser à l'approche des territoires reconquis de l'Est, vers ces Vosges où, lors d'une violente attaque allemande, sous un déluge de feu et d'acier, ce jeune homme de vingt ans succombale 4 août 1915, sur les pentes du Schratmännele, avec tant d'autres "chasseurs" du 106ème Bataillon de Chasseurs à Pied ?..


L'incident fatal à la jeune fille est survenu de la manière suivante, semble-t-il : la jeune Pauline, toute fraîche arrivée de sa Bretagne depuis quinze jours, se rendait à son bureau, accompagnée d'une collègue dactylo, tout en devisant. 

En français, bien entendu. Leur conversation aurait été entendue par des passants qui les prennent à partie. L'affaire dégénère : elles sont bousculées et frappées. L'une d'elle, notre héroïne, est grièvement blessée et décède à Mayence. Nous sommes le 11 mars 1920.

Pour la presse régionale de l'époque (Ouest-Éclair), qui s'empare de l'affaire en première page, l’affaire est bien entendu très grave et surtout édifiante.

L'article qui couvre l’évènement est un florilège d'agressivité "anti-Boche".

Dans un premier temps, le journaliste rappelle que ce genre de faits, dont les Allemands seraient coutumiers, caractérise l'esprit ou la mentalité germanique et "prussienne" : pas de respect pour la loi (violation des traités), violation des lois de l'hospitalité (sans rire), lâcheté (attaques de personnes isolées).

Sur le ton de l'indignation sarcastique, le journaliste de Ouest-Éclair ironise : que deux personnes parlent français est bien entendu "une provocation intolérable pour les Prussiens, puisque nous n'avons pas voulu devenir leurs esclaves".

Que les "provocateurs" soient de surcroît deux femmes (sous-entendu : faibles et sans défense), a excité "le courage des patriotes prussiens qui ne leur permit pas de supporter l’offense". D'où l'a bagarre mortelle.

La dépouille de la jeune fille refit en train le chemin inverse et fut rendue à sa mère qui vivait retirée à Guémené-Penfao. Elle fut donc enterrée dans cette commune, contrairement à Baptiste le frère soldat dont on ignore le lieu de sépulture, perdu sans doute en Alsace.

Mais séparés par la mort, Pauline et son frère le sont aussi dans le souvenir et l'hommage : le nom de Pauline Forestier, finalement Morte pour la France elle aussi, n'est ainsi pas gravé sur le monument aux morts du cimetière de Guémené, au côté de celui de Baptiste.

Comme on le sait, ce monument aux morts est surmonté d'une composition sculpturale où une jeune femme en costume de Guémené pleure un soldat mort étendu à ses pieds. Imaginons un instant que ce soit Pauline et Baptiste. Voici donc quelques photos nouvelles de "leur" mémorial imaginaire :










2 commentaires:

  1. Une Forestier née à Avessac, ça m'intéresse ça ! Connaissez-vous le nom de ses parents ?

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    1. Le père s'appelle François Forestier, né le 10 février 1852 à La Bergerie en Avessac. La mère est Marie Renaud, née le 16 février 1861 au Chien Hané en Avessac. Ils se marient le 23 juin 1887 à Avessac, elle est alors domiciliée à Tily chez ses parents. Je ne sais la date de décès du père. La mère mourra à Guémené le 26 juillet 1949. En 1906, ils habitent à la Ville en Bois et sont cultivateurs. Ils ont 3 enfants : Marie née le 15 décembre 1887 qui mourra à Redon le 19 décembre 1972 ; Baptiste né en 1890, mort en 1915 au front ; Pauline née en 1903 et morte en mars 1920.

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