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samedi 9 mars 2013

Vitraux et merveilles (4)


Un sujet simple, aujourd'hui : les "vitraux Laurent Dubourg" (photos en fin d'article, as usual...).


Ces deux vitraux sont à la vue de tout le monde car situés dans celle des chapelles rayonnantes qui se trouve derrière le choeur. Autrement dit, les vitraux en question font partie de l'ensemble des dix vitraux qui s'alignent côte à côte, au fond de l'église.

Précisément, ces oeuvres se situent à la gauche des vitraux centraux représentant Jeanne d'Arc et Saint-Georges (j'aurai forcément l'occasion de revenir sur ces derniers, un jour).

Ces vitraux sont dédiés "à la mémoire de Monsieur Laurent Dubourg", ce qui nous indique déjà qu'il n'en est pas le donateur. Au demeurant, rien n'indique l'identité de ce dernier.

Laurent Dubourg était né le 6 mai 1830 à Guémené. Il mourut le 26 avril 1887 au bourg, où il résidait toujours. 

Il était le fils de René Dubourg, "notaire royal à la résidence de Marsac" et apparenté, par sa mère Julienne Simon, à la dynastie municipale bien connue (elle était la sœur du membre fondateur, François Simon, auquel j'ai consacré il y a quelques temps un petit sujet sur ce blog). Bref, un enfant de bonne famille, de la classe des notables guémenois navigant entre commerce, droit, propriétés et rentes.

Il s'était honoré dans la profession de "Receveur des Contributions Indirectes", dont il s'était retiré, et  il est gratifié par ailleurs du statut enviable de "propriétaire".

Célibataire, il demeurait avec sa soeur Jenny (Jeanne-Perrine-Julienne, à vrai dire), laquelle, dans un sursaut d'amour sororal, est probablement à l'initiative de l'hommage verrier à son frère le percepteur.

Les vitraux ont été réalisés par l'atelier d’Angers où œuvrait Jean Clamens dont il a déjà été souvent question dans les posts précédents. Mais la signature des vitraux mentionne deux autres maîtres verriers : Megnen et Bordereau.

En effet, Jean Clamens , après la retraite de son patron Louis Truffier en 1879, reprend l'affaire avec Charles Bordereau (gendre de Truffier) et Victor Megnen (un figuriste verrier de la maison Truffier). En 1895, l'association prend fin et les vitraux sortis de cet atelier ne portent plus désormais que la seule mention de "Jean Clamens".

Avec les "vitraux Laurent Dubourg" qui ne sont pas datés, nous sommes dans la période du triumvirat des artistes angevins. On peut présumer que leur exécution se situe autour de 1890.

La composition de l'oeuvre obéit aux règles déjà observées de cet atelier. Ainsi, chaque vitrail comprend trois parties : la partie supérieure avec le personnage principal ; en dessous une scène de sa geste ; le pied de l'oeuvre fournit les indications usuelles d'identification de l'atelier et de la famille concernée par le vitrail.

C'est sans grande surprise que le vitrail de gauche fait apparaître Saint Laurent auréolé. Comme c'est l'usage, il porte les attributs de son supplice, un gril à la main gauche, et la palme du martyr à la main droite. Il porte un habit rouge moucheté de petites flammes.

La scène qui illustre sa vie représente sans grande surprise non plus son "rôtissage". Le saint, simplement vêtu de son auréole et d'un manteau rouge, est allongé, tout tordu, sur le fameux gril. Deux hommes le tiennent, car il a l'air de se débattre. Un troisième s'affaire à entretenir le feu sous le gril. Un soldat casqué représentant le préfet de Rome Dacien, qui n'a pas l'air très commode et vers lequel Laurent porte son regard, brandit une sorte de bâton tandis qu'il tient le bras droit du martyr.

Ce brave Dacien voulait faire avouer à Laurent, en le cuisant à petit feu, où l'Eglise cachait son argent pour le lui prendre et le donner bien gentiment à l'Empereur qui se trouvait à court de monnaie. L'enfer est pavé de bonnes intentions, comme on dit.

On aperçoit donc Rome (un bout de temple, d'autres bâtiments) et la statue de l'Empereur, à l'arrière-plan de l'oeuvre.

En miroir de ce premier vitrail, à sa droite, nous avons pour sujet Sainte Catherine de Sienne, cette intellectuelle italienne du 14ème siècle (elle est Docteur de l'Eglise). Elle est représentée en religieuse, le chapelet tenu d'une main sur la poitrine tandis que de l'autre elle arbore un lys.

Entre autres moments importants de sa vie humaine et spirituelle, Catherine reçut les stigmates  et c'est probablement ce moment que représente l'atelier angevin dans la seconde partie du vitrail (elle épousa "mystiquement le Christ aussi....).

Agenouillée face au Christ, Catherine lui tend ses deux mains, paumes retournées vers lui. Le Christ sur un tapis nuageux, un bras vers le ciel, lui tend de l'autre un petit Sacré-Cœur.

Le pied de ce vitrail reprend exactement celui du précédent, répétant donc la mention "à la mémoire de monsieur Laurent Dubourg", avec, presque illisible, la signature des maîtres verriers d'Angers.

On peut s'interroger sur la raison qui a conduit à retenir le motif de Sainte Catherine de Sienne : Laurent Dubourg n'était pas marié et Catherine n'est donc pas le prénom d'une épouse. Sa sœur avec qui il partageait son existence se prénommait tout sauf Catherine.

Je vois deux possibilités : une dévotion particulière du défunt à cette sainte ou à ses oeuvres. Ou bien plus prosaïquement le fait qu'il mourut et fut enterré vers la Sainte Catherine, le 29 avril.

J'écarte bien entendu tout rapport avec le fait que la sœur de Laurent, vielle fille, ait pu coiffer Sainte Catherine à plusieurs reprises, car dans ce cas, il s'agit de Sainte Catherine d'Alexandrie. Enfin, une erreur est toujours possible.

Pour finir, je vous joins quelques photos des vitraux, prises ces jours-ci. Pour les amoureux des reliques un  peu hard, je vous produis également, en bonus, une photo de la tête de Sainte Catherine de Sienne. On voit bien qu'elle n'est plus toute jeune.








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