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dimanche 17 mars 2013

Vitraux et merveilles (5)


Me revoilà, après une petite pause, avec ma saga des vitraux de l'église de Guémené.

Comment imaginer que cela nécessiterait autant d'énergie et de temps ! Et puis il reste tant à montrer et commenter....

Bon, pour cette fois, un petit sujet qui permet d'introduire le troisième atelier de vitraux représenté dans l'église, après les ateliers du Nantais Meuret et celui de l'Angevin Clamens.

Mais cela permet à nouveau de vérifier à la fois l'envers social de cette piété religieuse des commanditaires, et la sûreté de leurs moyens sinon de leurs goûts.

Il s'agit de quatre vitraux assez peu spectaculaires situés de part et d'autre du Choeur, dans les deux chapelles au nord du bâtiment.

La première paire se devine plus même qu'elle ne s’entre-aperçoit sur le cliché suivant, au fond à droite au-dessus de l'orgue, derrière le pilier.




 L'autre paire lui fait face et se trouve sur la photo ci-dessous tout à droite du pilier.






Comme on peut l'entrevoir, ces oeuvres ne sont pas figuratives, mais composées de figures géométriques et d'arabesques de couleurs. Tout au plus, un liseré de feuilles borde les quatre vitraux. 

Seule la composition dans la chapelle de Saint-Christophe, à l'ouest du Choeur, comporte une signature d'atelier. Mais la quasi identité des dessins ne laisse aucun doute sur la communauté d'origine de ces deux paires de vitraux dont chacun, en revanche, fait l'objet d'une attribution particulière s'agissant du donateur.

L'atelier à l'origine de cette production est parisien : le maître verrier s'appelle Charles Champigneulle et était actif au 96 de la rue Notre Dame des Champs dans l'actuel 6ème arrondissement. L'emplacement de cet atelier est aujourd'hui occupé par un immeuble d'habitation en briques. Une petite rue lui fait face : elle se nomme la rue Le Verrier, du nom...d'un astronome.

Charles Champigneulle est le fils de...Charles Champigneulle, artiste lorrain et maître verrier à Bar-le-Duc où il dirige une entreprise de renommée internationale. Notre Charles à nous, le  II, est né à Metz en 1853 et a commencé sa carrière chez son père, Charles I.

Il l'a continuée à Paris dans les années 1880. C'était à son époque un artiste reconnu et récompensé. Il est notamment connu pour avoir réalisé avec son frère Emmanuel les vitraux de l'église St-Pierre de Bouvines, dans le département du Nord. On peut également apprécier son talent dans l'église St-Jacques de Compiègne ou Notre-Dame de Sablé-sur Sarthe


La dynastie des Champigneulle se poursuivit sur deux générations avec le fils Charles-Marie, architecte et maître verrier (mort prématurément) et le  petit-fils Jacques-Charles maître-verrier également, qui acquit la notoriété grâce à la décoration du salon du paquebot Normandie.

Encore une fois, les commanditaires des oeuvres de Guémené savaient trouver les bonnes adresses. 

Ces commanditaires justement sont au nombre de quatre ou plus exactement quatre groupes :

Chapelle St-Christophe :

Vitrail de gauche : Aristide Frèrejouan du Saint
Vitrail de droite : Messieurs Charles et Joseph Couasnon

Chapelle de La Vierge :

Vitrail de gauche : M. et Mme Georges du Saint ; Melle Marie Couasnon
Vitrail de droite : Melle Eugénie Caroline de K.

Malgré pas mal de recherches sur Internet, je n'ai pas trouvé grand chose sur les trois derniers groupes de donateurs.  "Georges du Saint" est peut être la forme abrégée de "Georges Frèrejouan du Saint". Ce dernier, né à Guémené en 1850 était un juriste émérite à son époque (on trouve, et donc on consulte,  encore certains de ses ouvrages. Par exemple : un traité de droit sur les jeux et paris).

Quant aux autres, notamment les Couasnon, ce sont probablement les membres d'une famille alliée des Frèrejouan du Saint.

En effet, la fille d'Aristide Frèrejouan du Saint, Anne-Marie-Charlotte, a épousé en 1865 un Auguste-Marie-Joseph Couasnon, notaire, né natif du bourg de Guémené. Lors de l'établissement de l'acte de naissance d'Auguste, à la mairie de Guémené, l'un des deux témoins était le père d'Aristide...Vous me suivez ? - On continue...

Pour sa part, Aristide Frèrejouan du Saint est un ancien notaire né au début de son siècle, sous l’Empire, et décédé le 5 avril 1888. Son père, Pierre-Michel, était Contrôleur des Droits Réunis (percepteur des contributions indirectes) et adjoint municipal à Guémené lors de la naissance de son fils.

Aristide fut donc notaire et surtout propriétaire. Il fut par ailleurs le père du Georges juriste évoqué ci-dessus, qu'il eut de son mariage avec une dame Crépon, Jenny, fille d'un Substitut du Procureur du Roi de la Sarthe et nièce d'un Procureur Impérial de St-Etienne (on aura l'occasion un jour prochain de s'apercevoir que cette dame a également laissé une trace dans l'église de Guémené).

En somme, Aristide a baigné sa vie professionnelle et familiale durant, dans l'univers de la basoche.

Lors du constat du décès de l'ancien notaire en mairie, les deux témoins furent Amaury du Halgouët et Arthur de Boisfleury, bref un échantillon le gratin social guémenois. Le père Aristide devait d'ailleurs tenir à sa particule "du" dans son "du Saint", car on apprend que pas moins qu'un jugement du tribunal de St-Nazaire en août 1877 fixe que c'est bien ainsi que les choses s'orthographient. Encombrement des tribunaux...

Voici maintenant quelques photos, comme d'habitude, montrant le détail des inscriptions au bas des différents vitraux. Affaire à suivre.





1 commentaire:

  1. Bonjour et bravo pour votre article ! Je cherche pour ma part une image du vitrail réalisé pour l'hôtel particulier de l'actrice Judic, à Paris, représentant Antoine et Cléopâtre d'après Tiepolo, si par hasard, vous étiez tombé dessus, je serais content de l'avoir, merci d'avance.

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